Vie de Malek Jân Ne'matî
Parution récente (avril 2007) aux éditions Diane de Selliers d'un ouvrage consacré à Malek Jân, la soeur de l'Ostad Nûr Alî Elahi, et désignée par ce même frère Sheikh ahl-e Haqq, malgré son sexe.
Le livre est en fait composé de deux parties, la première étant une biographie, heureusement replacée dans le contexte historique de l'Iran du début du 20° siècle, avec également une présentation succincte, mais assez claire pour les non-initiés, de ce qu'est la secte des Kurdes Ahl-e Haqq ou Yarsan. Les figures spirituelles de son père Hadjî Ne'mat et de son frère sont bien sûr prégnantes dans ce parcours religieux et font regretter que des biographies et des études vraiment poussées ne leur aient pas été consacrées, de même que l'essentiel de leurs ouvrages n'ont pas été traduits du persan.
Par moment, la biographie frôle l'hagiographie tartignolle et les faits les plus intéressants sont juste effleurés : l'opposition des autres clans ahl-e haqq, puissantes familles de sheikhs, à ce yarsanisme "réformé", le problème de l'appartenance ou non des Ahl-e Haqq à l'islam, sous le voile d'une prudente taqiyah ; certaines dissensions familiales juste évoquées de façon allusive ; les Yaresan face aux Gardiens de la Révolution après 1979... Quant à l'enseignement de Nûr Alî Elahî ( que Malek Jân avait pris pour murshîd) il faut se reporter à d'autres ouvrages (cités plus bas) pour le comprendre mieux.
Suit dans la seconde partie une traduction de certains de ses poèmes mystiques (mais pas transcendants) et un extrait de questions-réponses entre fidèles et murshid. Les "dits" de Malek Jân qui ont été choisis ici s'adressent visiblement à un public occidental, avec tous les ingrédients faits pour le rassurer, : la condition féminine, avec notamment l'accession aux femmes de rites réservés aux hommes (comme le souligne drôlement Leili Anvar : "Dans son milieu cette décision fait figure de véritable révolution. Ce serait un peu comme si mère Thérésa avait décrété quelque part dans un village reculé que les femmes pouvaient être ordonnées prêtres", comme quoi on est plus évolué à Kermanshan qu'à Rome) ; l'absence de condamnation de l'homosexualité (car paradoxalement, dans nos sociétés "libérées" des interdits religieux, nos contemporains n'ont de cesse de faire avaliser leurs pratiques sexuelles - à défaut de les faire bénir - par un leader religieux ou un autre, fût-ce le plus exotique) ; l'insistance sur les bienfaits de la science, etc. Bon, ouf, on respire : bien qu'Iranienne et religieuse, Malek Jân était féministe, anti-homophobe, anti-anti-IVG, et probablement écologiste, même si sa mort en 1993 ne lui a peut-être pas laissé le temps de se prononcer sur les OGM et le problème de la couche d'ozone.
En conclusion, un livre qui peut donner envie d'en savoir un peu plus sur les Yaresan (dont la religion et les très beaux hymnes avaient été partiellement traduits par Mohammad Mokri qui vient tout juste de mourir) et faire comprendre au public moyen que le Moyen-Orient est quelque chose d'un peu plus varié en ethnie et croyances qu'un vaste Petrolistan arabophone et musulman.
Autres ouvrages facilement disponibles en français sur les Ahl-e-Haqq :
- L'Esotérisme kurde de Nûr Alî-Shâh Elâhî, traduit, introduit, commenté et annoté par Mohammad Mokri, Albin Michel.
- La Voie de la perfection ou l'enseignement secret d'un maître kurde en Iran, Bahrâm Elâhî, Albin Michel.
- Connaissance de l'âme, Ostad Elahî, éd. L'Harmattan.
- Musique et mystique dans les traditions de l’Iran, Jean During, Institut français de recherche en Iran, 1989
Discographie :
Chant du Monde a heureusement réédité les enregistrements de l'Ostad Nûr Alî.
Le livre est en fait composé de deux parties, la première étant une biographie, heureusement replacée dans le contexte historique de l'Iran du début du 20° siècle, avec également une présentation succincte, mais assez claire pour les non-initiés, de ce qu'est la secte des Kurdes Ahl-e Haqq ou Yarsan. Les figures spirituelles de son père Hadjî Ne'mat et de son frère sont bien sûr prégnantes dans ce parcours religieux et font regretter que des biographies et des études vraiment poussées ne leur aient pas été consacrées, de même que l'essentiel de leurs ouvrages n'ont pas été traduits du persan.
Par moment, la biographie frôle l'hagiographie tartignolle et les faits les plus intéressants sont juste effleurés : l'opposition des autres clans ahl-e haqq, puissantes familles de sheikhs, à ce yarsanisme "réformé", le problème de l'appartenance ou non des Ahl-e Haqq à l'islam, sous le voile d'une prudente taqiyah ; certaines dissensions familiales juste évoquées de façon allusive ; les Yaresan face aux Gardiens de la Révolution après 1979... Quant à l'enseignement de Nûr Alî Elahî ( que Malek Jân avait pris pour murshîd) il faut se reporter à d'autres ouvrages (cités plus bas) pour le comprendre mieux.
Suit dans la seconde partie une traduction de certains de ses poèmes mystiques (mais pas transcendants) et un extrait de questions-réponses entre fidèles et murshid. Les "dits" de Malek Jân qui ont été choisis ici s'adressent visiblement à un public occidental, avec tous les ingrédients faits pour le rassurer, : la condition féminine, avec notamment l'accession aux femmes de rites réservés aux hommes (comme le souligne drôlement Leili Anvar : "Dans son milieu cette décision fait figure de véritable révolution. Ce serait un peu comme si mère Thérésa avait décrété quelque part dans un village reculé que les femmes pouvaient être ordonnées prêtres", comme quoi on est plus évolué à Kermanshan qu'à Rome) ; l'absence de condamnation de l'homosexualité (car paradoxalement, dans nos sociétés "libérées" des interdits religieux, nos contemporains n'ont de cesse de faire avaliser leurs pratiques sexuelles - à défaut de les faire bénir - par un leader religieux ou un autre, fût-ce le plus exotique) ; l'insistance sur les bienfaits de la science, etc. Bon, ouf, on respire : bien qu'Iranienne et religieuse, Malek Jân était féministe, anti-homophobe, anti-anti-IVG, et probablement écologiste, même si sa mort en 1993 ne lui a peut-être pas laissé le temps de se prononcer sur les OGM et le problème de la couche d'ozone.
En conclusion, un livre qui peut donner envie d'en savoir un peu plus sur les Yaresan (dont la religion et les très beaux hymnes avaient été partiellement traduits par Mohammad Mokri qui vient tout juste de mourir) et faire comprendre au public moyen que le Moyen-Orient est quelque chose d'un peu plus varié en ethnie et croyances qu'un vaste Petrolistan arabophone et musulman.
Autres ouvrages facilement disponibles en français sur les Ahl-e-Haqq :
- L'Esotérisme kurde de Nûr Alî-Shâh Elâhî, traduit, introduit, commenté et annoté par Mohammad Mokri, Albin Michel.
- La Voie de la perfection ou l'enseignement secret d'un maître kurde en Iran, Bahrâm Elâhî, Albin Michel.
- Connaissance de l'âme, Ostad Elahî, éd. L'Harmattan.
- Musique et mystique dans les traditions de l’Iran, Jean During, Institut français de recherche en Iran, 1989
Discographie :
Chant du Monde a heureusement réédité les enregistrements de l'Ostad Nûr Alî.
Commentaires
Enregistrer un commentaire