Interview de Saywan Barzanî : le PKK et la Turquie doivent rester en-dehors du Kurdistan d'Irak
... et la Turquie doit régler sa Question kurde et le PKK cesser la lutte armée. Voilà en gros les commentaires sur la crise apportés par Saywan Barzani, représenttant du Gouvernement kurde à Paris, dans une itnerview accordée à asianews.
"Comment expliquez-vous la récente escalade des tensions entre la Turquie et l'Irak ?
L'actuelle escalade turque est due à un conflit interne entre la puissante armée turque et le gouvernement islamiste élu. Les deux camps, laïcs et islamistes, essaient de se renforcer sur une question unificatrice, qui est la Question kurde.
La montée de la violence chez les voisins de la Turquie représente un échec de la politique d'Ankara’s policies. Depuis la fondation de la Turquie moderne, cette dernière a dû faire face aux révoltes des Kurdes, lesquels demandent un minimum de droits culturels, politiques et économiques.
Le Gouvernement du Kurdistan irakien ne peut être blamé si les régions kurdes de Turquie vivent dans une pauvreté extrême et si l'existence même des Kurdes est niée. Les rebelles kurdes mènent une guerre civile qui affecte dans une large mesure les populations civiles et le sous-développement évident des régions kurdes de Turquie comparées au reste du pays. Environ 4000 villages ont été évacués et détruits. La région orientale de Turquie est devenue une terre hors-la-loi, une zone pour toutes sortes de trafics, s'élevant à des billions of dollars, que ce soit dans la drogue, les armes ou la contrebande d'alcool.
Quelles sont les relations entre Ankara et le Kurdistan irakien ?
La création du Gouvernement irakien du Kurdistan en 1992 a été une chance pour la Turquie. Initialement, la violence avait chûtée de 80%.
Plus de 32,000 camions transportaient des marchandises destinées au Kurdistan irakien. Tout le sud-est de la Turquie survit essentiellement grâce au commerce officiel avec notre région. L'année dernière, les exportations de la Turquie ont dépassé les 5 billions de $US, avec 700 sociétés turques qui y sont actives.
Nous aussi, nous voulons que le PKK cesse la lutte armée, non parce que nous croyons que le peuple kurde y obtiendra des droits quelconques, mais plutôt parce qu'en Turquie on peut utiliser les institutions démocratiques pour réaliser pacifiquement des réformes structurelles.
La menace d'une intervention turque "sur une large échelle" dans les territoires orakiens est-elle réaliste ?
L'escalade et les menaces militaires d'un autre âge sont de nos jours sans aucun fondement et ne peuvent être d'aucun intérêt pour la Turquie sauf à y entretenir son nationalisme du XX° siècle, et la doctrine officielle de l'Etat et de l'armée.
D'abord, le but déclaré d'éradiquer le PKK est impossible à atteindre. Ces dernières années l'armée turque a mené 25 incursions en Irak sans aucun résultat tangible. Les combattants kurdes de Turquie s'étalent sur une zone de 130 kilomètres à une altitude de 3,400 mètres. Cela prendrait 15 jours à un tank turc pour la parcourir, alors qu'en deux heures de marche la guerilla peut passer en Iran.
Même si la Turquie tue quelques milliers de combattants, d'autres prendront leur place. Il y a des milliers de PKK en Iran, en Turquie, en Azerbaidjan, en Arménie et en Géorgie.
La Question kurde demande une solution politique, et non des menaces d'extermination qui ont échoué et empêchent d'arriver à quoi que ce soit. Quelle que soit le type d'incursion militaire que la Turquie puisse mener, elle ne servira qu'à ruiner les économies turque et irakienne et à déstabiliser la plus grande partie de la région.
Comment la communauté internationale peut résoudre la crise ?
La seule solution passe par la négociation et l'absence d'interférence dans les affaires internes des uns et des autres. Par exemple, les voisins de l'Irak ne devraient pas interférer dans la façon dont vont se décider les frontières du Kurdistan lors du référendum de Kirkouk.
De plus, en tant que protecteur de l'Irak mandé par les Nations Unies, les Etats-Unis doivent clairement faire savoir leur position aux Turcs et rejeter tous les arguments et prétextes sans fondements qui sont avancés. Les Américains doivent imposer la paix et appeler le PKK et le gouvernement d'Ankara à rester en dehors du Kurdistan d'Irak, qui émerge tout juste de 40 années de guerre et de génocide.
L'opinion publique occidentale et ses gouvernements sont les seuls qui peuvent inciter les Turcs à poursuivre une politique pacifique, à arrêter de menacer le Kurdistan irakien, cette démocratie naissante, et à trouver une solution à leur Question kurde, vieille de 80 ans."
source : asianews.it
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