vendredi, février 22, 2008

Où l'on reparle du cas Kamal Qadir

La loi sur le journalisme qui avait été votée par le Parlement kurde, avant que Massoud Barzani ne renonce à la signer, sous la pression des journalistes et leurs syndicats, comprenait un article (10.2B) qui interdisait entre autres, textuellement, tout propos ou atteinte "relatif à la vie privée, même si c'est vrai, si cela vise à insulter." J'adore le "même si c'est vrai", il me fait toujours rire...



Ce matin, dans ekurd.net, je parcours machinalement un post sur Kamal Qadir, dont le contenu me dit vaguement quelque chose... Evidemment, cela avait été publié l'an dernier il y a deux ans sur Roj Bash et sur ce blog... Apparemment, à l'époque j'avais été la seule à relever que le contenu des attaques du "Voltaire kurde" aurait été de même attaqué en justice dans n'importe quel pays démocratique se devant de protéger ses citoyens de calomnies ou d'atteintes à la vie privée... Finalement, après un an, ça fait le tour dans les esprits? Je reposte ici le texte publié en janvier de l'an dernier, par commodité :

"En gros, les mésaventures de Kamal Qadir peuvent se résumer ainsi. Il écrit depuis des années des articles fustigeant la corruption et le népotisme du gouvernement kurde, alignant pour cela des faits probablement très vérifiables et indubitables. N'est-ce pas son droit selon les critères de la liberté d'expression ?

Et de ce fait, durant son emprisonnement il a bénéficié de la défense et du soutien non seulement des voix kurdes au nom de la démocratie, mais aussi de grandes ONG spécialisées dans les droits de l'Homme et de la liberté d'expression, comme Amnesty et Reporter sans Frontière. Le Gouvernement autrichien s'est naturellement soucié du sort d'un de ses ressortissants.

Comme on le voit, à première vue, cela apparaît comme un combat "intellectuels progressistes-démocrates" vs "gouvernement rétrograde et arbitraire"... Les premiers ont gagné, Kamal Qadir a été libéré, la morale est sauve.

Sauf que... personne n'a noté que la teneur des "insultes" proférées à l'encontre de certains membres de la famille Barzani contrevenait aussi à cet esprit démocratique, pro-droits de l'Homme, qui veut, en tous cas selon les critères occidentaux sur lesquels Qadir et ses partisans se sont appuyés pour le faire libérer, que nul se soit inquiété pour ses opinions religieuses, politiques... ou choix de vie sexuels.

Or, en traitant certain membre de la famille Barzani d'homosexuel à titre d'injure, ce même "Dr. Qadir" tombe sous le coup de l'atteinte à la vie privée et du délit d'homophobie, ce qui, selon les critères de la dméocratie occidentale, tombe aussi sous le coup de la loi, l'homophobie est en effet de nos jours, dans la plupart des pays européens, un fait qui suscite autant de réprobation que l'injure raciste. Dire, comme le fait ce journaliste du New York Times que Qadir a enfreint certaines limites dans l'insulte d'une façon qui n'est pas admise au Moyen-Orient n'est pas faux, mais on peut douter qu'en Autriche il puisse publier un papier accusant d'homosexualité les membres du gouvernement autrichien. Par ailleurs, s'il publiait en Europe de tels propos, il serait probablement attaqué en justice par toute une pléiade d'association de défenses des Gays et Lesbiennes, qui n'aiment guère qu'on utilise leurs penchants sexuels en termes d'insultes et d'armes politiques.

Par conséquent, une fois revenu en Autriche, Qadir pourrait, en toute logique, être attaqué en justice au nom de ces mêmes droits et libertés qui l'ont fait sortir de prison au Kurdistan...

On le voit, dans cette affaire qui oppose de façon intéressante deux mondes, deux échelles de valeurs, le camp des progressistes droidlomistes et les "vieilles" sociétés orientales, "corrompues" et "chatouilleuses" sur le qu'en dira-t-on sexuel, le principal protagoniste, la "victime" si l'ont veut est aussi assise sur deux chaises, en appelant d'un côté aux principes de liberté, et de l'autre en bafouant ces mêmes principes qui veulent que chacun soit libre de mener sa vie sexuelle comme il l'entend, si elle ne nuit à personne. Le "Dr Qadir" présente donc un cas intéressant de ces intellectuels à demi-occidentalisé, se réclamant tantôt des normes démocratiques et libertaires en vigueur en Europe, et ayant tantôt aux vieilles attaques et stigmatisations "féodales" dans leur mode de pensée et d'expression écrite.

Kamal Qadir a aussi qualifié de maquereau Massrur Barzani, le chef des services secrets kurdes, les Parastin, en l'accusant d'utiliser des prostitués pour leurs renseignements. Mais alors là, le seul commentaire qu'on puisse faire, c'est que ce genre de pratique n'est pas franchement l'apanage des services kurdes. A vrai dire, je me demande quels services secrets n'utilisent pas cette source d'information, vieille comme le monde..."


Rappelons les faits : il y a un an Kamal Qadir, pour avoir insulté sexuellement à peu près tout le Kurdistan d'Irak est arrêté et normalement aurait dû être condamné pour calomnie, atteinte à la vie privée, etc. Coup de théâtre, le GRK, furieux, fait peser sur lui les charges de complot contre la sûreté de l'Etat et il se prend deux fois 15 ans. Ce qui fait beaucoup, tout de même. Après une certaine campagne et une pression des milieux extérieurs, Massoud Barzani le gracie et le fout dehors. Hop, retour en Autriche. On en entend plus parler un certain temps, jusqu'à cette semaine, où il aurait été attaqué par balles par Masrour Barzani, celui qu'il avait traité de "maquereau", venu tout spécialement à Vienne pour le tuer. Ce qui me semble un peu gros, mais bon, si c'est le cas, j'ai honte pour lui. Car il est plus grave d'être idiot à ce point que maquereau quand on est chef de réseau...

2 commentaires:

  1. cette affaire n'etait pas d'il y a un an mais d'il y a bcp plus longtemps, non? 2004 peut-etre?

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  2. En fait, l'affaire a duré le temps qu'il écrive dans les journaux, le temps qu'il se fasse arrêter, et puis juger, et puis gracié. Mais de toute façon je viens de me rendre compte que de 2006 à 2008 il y a deux ans et non un, merci de m'avoir alertée.

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Concert de soutien à l'Institut kurde