Koya, Silemani, le Shahrazur
A Koya, on sent tout de suite qu’on atteint le sud. Il fait déjà chaud comme au début de l’été et les montagnes sont déjà jaunies et terreuses. Comme on passe aussi en zone UPK, on peut remarquer que le niveau de vie semble plus bas, la ville plus pauvre. Et ils ont encore moins l’habitude de voir des « touristes » se promener comme ça. Ce qui fait qu’après un tour dans le bazar, on fait connaissance avec les ASAISH. Bon, depuis la Turquie on a l’habitude mais il faut admettre qu’ici ils se donnent un mal fou pour avoir l’air pro et inflexibles… au moins une minute. En nous promenant dans quelques bureaux on est vite l’attraction des jeunes recrues hilares et ravies. Quant aux policiers en civils, d’habitude (je veux dire en Turquie) c’est les pires, inquisiteurs et parfois hostiles. Là ils fondent vite et semblent beaucoup plus désireux de nous éviter les tracasseries de leurs copains en uniformes (qui eux semblent désireux de nous éviter les embêtements de ceux des autres villes). En fait tout le nœud du problème consiste à ce qu’il est interdit de photographier les bâtiments officiels et les employés, forces, militaires etc. Avec les attentats c’est évident et surtout on n’a aucune envie de photographier ça. Aussi j’assure que bien sûr Roxane ne va pas photographier les locaux de police ni les recrues (ce qui ne l’empêchera pas le lendemain de faire un portrait de policier devant le lac Dokan et celui des deux jeunes policiers de l’hôtel, ravis). On doit revenir le lendemain pour qu’il nous fasse officiellement le papier dont ils ont déjà esquissé le thème principal en s’y mettant à plusieurs : le droit de tout photographier, montagnes, gens, animaux, lacs, mais pas eux (mon œil).
Koya est très chaud, mais l »hôtel est situé en hauteur, au dessus de la ville aussi le vent qui y souffle est parfait. On petit déjeune sur la terrasse en plein vent et on repart voir nos amis des ASAISH qui sont encore plus souriants et fondants, (ben oui depuis le temps qu’on se connaît hein) et on repart dans un autre bureau ou un autre policier en civil encore plus gentil et attendri devant mon bahdini (que j’essaie de soraniser un max) fait le fameux papier demandé.
Naturellement au lac Dokan, les responsables rétorquent que ce papier là concerne Koya et pas eux et que le papier de Saywan vient d’Erbil (bonjour l’esprit de réunification). En fait, ils veulent simplement mettre leur grain de sel à eux, et profiter de la distraction offerte. L’un d’eux nous accompagne au lac, pour vérifier que Roxane ne prend ni le bâtiment des services ni la maison de Talabani etc. Par contre il se fait volontiers tirer le portrait, faut croire que ça ne compte pas.
Silêmanî semble plus animée que Hewlêr au sens où ses habitants marchent plus vite dans la rue, affairés comme de vrais Parisien parfois. Sinon je ne vois guère de différence, le soir tout ferme assez tôt, les gens sont peut-être moins démonstratifs au premier abord que les Bahdini mais très gentils et serviables, gracieux. La ville en elle-même, beaucoup moins ancienne que Hewlêr, n’a pas grand-chose à montrer et sa réputation de ville plus « moderne » que Hewlêr me semble exagéré, tout ça pour quelques filles en T shirt… Cela a même un côté plus oriental que le Bahdinan, on sent l’Iran approcher.
Le lendemain Halabja, ville qui inquiète beaucoup les Yézidis apparemment, vu qu’on a l’objurgation instante de ne pas y dormir, mais de retourner passer la nuit à Silêmanî. Tout ça parce que les islamistes y sont, parait-il, plus actifs ou a cause des recentes emeutes ?. Bah ils vont pas nous lyncher. "Si vous avez le moindre problème, appelez-moi". Je ricane : « franchement, si on était cerné par les islamistes, ce n’est pas toi qu’on appellerait… » Appeler un député yézidi à la rescousse au milieu d’Ansar al Islam ? mdr… et pourquoi faire valoir ses relations avec un député juif pour impressionner des Skin Head pendant qu’il y est ?
Pour se rendre de Silêmanî à Halabja il faut traverser le Shahrazur, région dont l’importance pour les Kurdes fut grande à l’âge classique et au MoyenÂge, et dont est issu Shams ad Dîn le Shahrazurî, grand biographe de philosophes, dont Shrawardi, dont il fut le disciple postume et dont il commenta abondamment sa Sagesse de l’Orient. La carte indique la ville de Shahrazur pour un emplacement qui peut être celui d el’actuel Said Sadiq. En tout cas ce n’est qu’une bourgade pauvre et sale, comme les villes alentour. Le contraste entre les deux zones, PDK UPK est tout de même saisissant. Mais la plaine du Shahrazur est très jolie avec ses grands conifères, sa rivière et ses vignes. Les Shahrazuri sont aussi assez beaux, souvent mince, avec un beau visage et des yeux lumineux.
PHOTOS SANDRINE ALEXIE NON LIBRES DE DROIT
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