Les Kurdes de Djézireh et d'Irak au X° siècle
8 : Alep ; 37 : Mont Sindjar ; 44 : Mossoul ; 46 : Amid (Diyarbakir) ; 50 : Nisibe ou Nisibîn ; 54 : Harran ; 56 : Mardin ; 57 : Edesse ou Urfa ; 59 : Diyar Bakr (la région) ; 75 : Mayyafarqîn (auj. Silvan) ; 84 : Suq al-Ahad ; 82 : Kafar'azza.
A Mossoul (44) :
"De nombreux groupements y trouvent une résidence d'été comme un gîte d'hiver ; ce sont des fractions arabes des tribus de Rabi'a et de Mudar ou encore des Yéménites, ou même des groupes kurdes, comme les Hadhbaniya, les Humaidiya, les Lariya."
"Dans une ville appelée Suq al-Ahad (82), les marchés rassemblent, à l'occasion des foires périodiques, les laboureurs et les Kurdes qui y trouvent des effets et toutes sortes d'objets de commerce. C'était une ville au sol fertile, aux abondantes ressources, située près de la montagne, au bord d'une rivière qui se jette non loin de là dans le Grand Zab (79). Le territoire et les districts ruraux de Hazza sont voisins du précédent, et sont séparés des cantons de Mardj par le Grand Zab. Il y a là une ville appelée Kafr'azza (82), habitée par les Saharidja, riches chrétiens : c'est une petite localité, pourvue de marchés, entourée de fermes : les produits agricoles y foisonnent et la vie est à bon marché. Les Arabes bédouins viennent s'y approvisionner, et il y a dans ses abords des établissements de Kurdes."
Où l'on voit que nomades kurdes et arabes se partagent parfois les mêmes territoires, en alternance saisonnière : les Kurdes descendant probablement du zozan en hiver pour la plaine, les Bédouins remontant sans doute vers le nord pendant la saison chaude :
"Les deux Zab sont deux grandes rivières qui, si on les réunissait, seraient plus larges que la moitié du Tigre. Elles coulent à l'est de ce fleuve, prennent leur source dans des montagnes au milieu des cantons de l'Azerbaidjan, et se fraient un chemin entre les territoires de l'Arménie et les régions méridionales de l'Azerbaidjan. De nombreuses prairies s'étalent entre ces deux rivières, ainsi que des localités avec des domaines en parfaite condition et où, jusqu'à une époque récente, les habitants vivaient dans l'abondance et dans l'aisance. Mais les nomades se sont rués sur eux en grandes masses, les calamités les ont accablés, la région s'est dépeuplée et ainsi disparut l'antique prospérité. Pendant la saison froide elle sert de station d'hiver aux Kurdes Hadhbaniya, tandis que c'est le quartier d'été des Banu Shayban."
En Irak :
L'Irak, Ibn Hawkal, seconde moitié du X° siècle.
7 : frontières du Djibal (Médie ) ; 17 et 53 : Bagdad ; 18 : Takrit ; 19 : Mossoul ; 41 et 70 : Khanaqin.
"Nous avons eu l'occasion de signaler la courbure de la ligne frontière de l'Iraqk, à l'est, du côté de Takrit (18), depuis le Tigre jusqu'à près d'Alth (56), en longueur, d'où elle affecte la forme d'un arc (247) jusqu'à Daskara. Puis elle reprend la ligne droite et épouse la forme d'un arc jusqu'aux lisières du canton de Wasit, de la limite de l'Iraq aux approches de la montagne. Cette zone est peu cultivée : il y a des bourgs dispersés, peuplés en majeure partie de Kurdes et d'Arabes nomades, qui y possèdent des pâturages. Il en est de même à l'ouest, à partir de Takrit jusqu'à Anbar. Entre le Tigre et l'Euphrate, les cultures ne sont guère florissantes, sauf sur quelques milles en face de Samarra, et le reste consiste en terrains désertiques."
Ibn Hawqal, Configuration de la Terre, t. I, trad. Kramers & Wiet, Maisonneuve et Larose, 1965.
Est-ce que le livre d'Ibn Hawqal est vraiment intéressant : vivant ? écriture fluide ? ...Penses-tu qu'il était-il un agent de renseignements des Fatimides ?
RépondreSupprimerC'est un livre de géographe plus que de voyageur, un peu à la Hérodote, qui mêle des descriptions intéressantes et des données administratives ou économiques plus rébarbatives mais très utiles pour les historiens. Ce n'est pas un récit personnel à la Ibn Jubayr ou Ibn Battuta, c'est plus sérieux.
RépondreSupprimerAgent ? on le dit, Wiet, le traducteur laisse entendre que c'est possible sans qu'on puisse y apporter de preuves décisives, mais il est fort possible qu'il fournissait en renseignements le 2º Bureau fatimide tout en faisant réellement œuvre de géographe. Les savants-espions sont une tradition au Moyen-Orient, jusqu'à l'époque moderne.
André Miquel, spécialiste des géographes, est convaincu qu'il était un agent de renseignement pour les Fatimides. Jean-Claude Garcin en doute mais les arguments qu'il avance ne me semblent pas tellement convaincantes bien qu'intéressantes. N'empêche que ce serait un comble pour un agent secret, si on arrivait à établir, preuves à l'appui, qu'il est bien un agent secret, surtout après mille ans. Il aurait fait un bien piètre agent secret celui-là.
RépondreSupprimerWiet dans son introduction dit seulement que "Le voyageur se double chez Ibn Hauqal d'un négociant, peut-être aussi d'un espion au service des Fatimides : certains passages l'établissent, dans lesquels il enregistre avec fierté l'allégeance des populations aux "seigneurs du Maghreb". – Les notes qu'il a rédigées sur l'Espagne constituent un véritable rapport destiné aux Fatimides de l'Afrique du Nord. Il se complaît à dénigrer les Espagnols, il signale leur richesse et leur incapacité militaire, ce qui ne peut qu'inciter doublement à une agression."
RépondreSupprimerWiet prend en référence dans ce passage, un article de Brunschvig, "Un aspect de la littérature historico-géographique" in Mélanges Gaudefroy-Demonbynes, p. 149.