mercredi, mars 09, 2011

Le sort des chrétiens en Irak- Quelles perspectives ? II. Intervention du ministre des Relations extérieures de la Région du Kurdistan


Dr. Fallah Mustafa, ministre des Relations extérieures du Gouvernement régional du Kurdistan.

Merci beaucoup à tous, Mesdames et messieurs je suis très heureux de participer à cette conférence. Je ne parlerai pas longuement pour ne pas empiéter sur le temps de paroles du Dr. Fuad Hussein ou des autres collègques à cette table. Il est d'ailleurs important pour nous de nous concentrer, non pas sur le passé, mais sur le futur et la situation sur le terrain,
Le Kurdistan a toujours été fier de sa tradition de tolérance envers toutes les religions et tous les groupes religieux. Notre région est un rassemblement pacifique de plusieurs groupes religieux, de croyances si différentes et variées. Nous, Kurdes avons été les victimes de la pire des oppressions, de la violence et même de génocides, et pour cela nous nous sommes jurés de ne jamais perpétrer ce même comportement et que jamais la violence et l'intolérance ne gagnent notre Région. Même après cela, devant les phénomènes récents de persécution en Irak, toutes les religions ont été chaleureusement accueillies au Kurdistan. Il est donc naturel que les groupes persécutés y cherchent refuge et sécurité et nous sommes fiers de pouvoir les aider de quelque manière que ce soit. Nous gardons à l'esprit l'aide matérielle et morale que nous avons reçue nous-mêmes au cours de notre histoire, et nous pensons que nous avons le devoir de rendre à ceux qui en ont besoin ce qui nous a été donné dans le passé. 
Malgré les difficultés, plus de 10 000 familles chrétiennes ont fui les violences dans le reste de l'Irak et ont trouvé refuge au Kudistan depuis l'invasion du pays en 2003. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour les aider, mais nous manquons de ressources pour cela. Nous devons faire face à des besoins humanitaires immédiats, tels que le logement et la nourriture, mais aussi des besoins de moyen terme, dans les domaines de l'éducation et de l'assistance sociale. La communauté chrétienne du Kurdistan fait un travail remarquable pour faciliter l'intégration et l'adaptation des nouveaux arrivants et pour centraliser le soutien moral et matériel des chrétiens de par le monde. Nous accueillons chaleureusement les déclarations du ministère des Affaires étrangères français encourageant l'Union Européenne à nous apporter son soutien. Nous serons heureux de recevoir tout le soutien et l'aide possibles, de quelque pays que ce soit. L'assistance que nous apportons à ces familles a un coût, et nous aurons nous-mêmes besoin d'aide supplémentaire pour pouvoir procurer à ces familles tout ce dont elles ont besoin. 
Plusieurs agences des Nations Unies et ONG peuvent nous permettre de soulager notre fardeau. Nous savons que l'UNHCR travaille avec des réfugiés irakiens hors d'Irak, mais elle n'apporte pas énormément d'aide aux populations déplacées à l'intérieur du pays, spécifiquement au Kurdistan. Un comité a été mis en place pour traiter l'ensemble de la problématique liée à la population déplacée à l'intérieur du pays, et pour développer des solutions afin de leur venir en aide. Nous continuons à apporter une assistance médicale à toutes les victimes de violences en dehors de nos frontières, et nous nous efforçons de permettre une évacuation sécurisée pour ceux qui en ont le plus besoin. Nous mettons également en place des programmes spécialisés pour apporter tout notre soutien aux populations déplacées et leur permettre de trouver du travail au Kurdistan. Nous avons accordé un statut spécial aux enfants de personnes déplacées afin qu'ils puissent avoir accès à nos écoles et universités. 
La France, tout particulièrement, mais aussi le reste de l'Europe, a une tradition humanitaire remarquable pour apporter assistance à ceux qui en ont besoin. Et, de fait, sans le soutien de nombreuses personnes en France, nous n'aurions peut-être pas survécu aux horreurs qui nous ont été infligées dans les années 80 et 90. Nous continuerons donc à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour régler notre dette de gratitude envers ceux qui nous ont aidés dans les heures les plus noires. Nous espérons que vous trouverez également le moyen de soulager notre fardeau à l'avenir. 
Étant donné le cas sensible de la situation et la complexité de cette situation, de nombreuses familles, confrontées à l'incertitude, choisissent de risquer leurs vies pour quitter leur lieu d'origine et venir au Kurdistan, où elles ne savent pas quel avenir leur sera réservé. Le gouvernement d'Irak doit faciliter les transferts, notamment en ce qui concerne les services sociaux et les emplois. Concernant le statut des étudiants, l'intégration des étudiants dans la Région du Kurdistan, nous devons donner davantage de temps à ces étudiants pour documenter leur dossier et pour effectuer les démarches administratives. Nous devons également donner de l'argent à ces familles pour qu'elles puissent louer des logements en attendant de trouver des solutions définitives. 
Enfin, j'appelle les ONG et les Nations Unies à se coordonner avec le Gouvernement régional du Kurdistan pour s'impliquer davantage dans le soutien apporté aux familles de populations déplacées et, notamment, les familles de veuves et d'orphelins. Sur le long terme, la communauté internationale peut faire beaucoup pour nous aider à mettre en place un Irak ouvert, démocratique, digne et égalitaire. Nous traversons un moment de transformation en Irak et nous devons nous concentrer sur l'avenir de ce pays. Nous devons, bien sûr, nous engager à faire respecter la constitution, et la communauté internationale peut apporter tout son soutien moral à l'Irak à cette fin. 
Enfin, puisqu'un point a été soulevé concernant la constitution, je dois dire que c'est le gouvernement régional du Kurdistan qui a insisté pour que l'islam ne soit pas la source unique de la législation. Qu'il soit une source de législation mais pas une source unique. C'est grâce à ce leadership que nous avons pu appliquer ce principe dans la constitution irakienne. 
Par ailleurs, nous devons travailler d'arrache-pied pour promouvoir le principe de la coexistence pacifique et de la tolérance, et pour protéger la diversité. Nous croyons à la diversité, nous comprenons qu'elle est centrale, nous voulons que la diversité soit respectée partout en Irak. Nous devons également faire en sorte que le gouvernement fédéral à Bagdad fasse du respect de la constitution une priorité. Nous pensons que le gouvernement central n'a pas pris la constitution au sérieux, qu'il n'a pas apporté toute l'attention nécessaire à la question des déplacements de populations, de communautés entières à Bagdad et Mossoul ou ailleurs, que ce soit dans l'ensemble de l'irak, que ce soit pour les chrétiens, pour les musulmans, pour les Kurdes. Il doit faire en sorte que l'Irak soit un pays démocratique, ouvert et sûr, et c'est sur ces principes-là que nous devons bâtir l'avenir. 
La France et d'autres pays de l'Union européenne, qui croient en les libertés individuelles et collectives, peuvent nous y aider, La Région du Kurdistan ne prétend pas être parfaite, bien sûr. Nous avons également des défauts, il y a certaines choses que nous pourrions améliorer, mais nous pouvons faire beaucoup pour aider ces communautés déplacées et devenir un véritable exemple pour le reste de l'Irak. 
Par ailleurs, cette communauté chrétienne, la diaspora chrétienne, peuvent également faire beaucoup en encourageant leurs investisseurs à fournir des emplois, à créer des emplois, à créer des usines en Irak et au Kurdistan. Enfin, nous devons faire de notre mieux pour faire que les chrétiens ne quittent pas l'Irak, parce que nous pensons qu'il va de leur intérêt, dans le long terme, de rester en Irak, même s'ils séjournent temporairement au Kurdistan ou dans les pays voisins. Cela a été dit précédemment, ainsi que par le président Barzani, ce serait une erreur que de quitter l'Irak. 
Je vous remercie.

À venir : Dr. Fuad Hussein, directeur de Cabinet du président du Kurdistan.

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