We Are All Pêşmerge / Nous sommes tous Pêşmerge : Pour la reconnaissance d'un État kurde




"Les Pêşmerge sont des héros. Pas seulement pour le peuple du Kurdistan, mais aussi comme rayon d'espoir et de paix dans le reste du Moyen-Orient, pour des jours meilleurs. Une campagne de soutien aux Pêşmerge est en cours sur Facebook et Instagram et Twitter : Nous sommes tous des Pêşmerge, témoignant de notre admiration devant la résistance des Pêşmerge face à la terreur : #WeAreAllPêşmerge / #WeAreAllPeshmerge devient viral sur les réseaux sociaux. 
La bravoure et le courage des forces Pêşmerge ont été mis en évidence dans les media du monde entier lors des dernières semaines, les reportages montrant qu'ils ont protégé des civils innocents fuyant les attaques en Irak de terroristes venant de Syrie. Ces terroristes se donnent le nom d'État islamique en Irak et au Levant (EIIL), indiquant leur objectif d'instaurer un État fondé sur la Sharia selon l'interprétation que font les Wahabites de la loi islamique, interprétation que l'on peut au mieux qualifier de rétrograde. 

Alors que l'armée irakienne aurait fui en masse, laissant véhicules, armes et matériel – et que la plupart des hommes auraient même laissé leur uniforme par peur d'être identifiés – les forces Pêşmerge sont intervenues le jour même pour sauver les vies de centaines de milliers de personnes dans les provinces de Mossoul, Kirkouk et Diyala. Il est apparu que la plupart de ce matériel et armement sont tombés aux mains des terroristes, les rendant mieux équipés que les Pêşmerge. Nous remercions pour cela les États-Unis qui ont refusé d'armer les Pêşmerge de peur qu'une puissante armée kurde mène à une indépendance kurde. Malheureusement, comme l'a dit dans une récente interview au CS Monitor le commandant de l'unité Pêşmerge du Contre-terrorisme, Polat Talabani : "Nous sommes là-dedans à 100% mais on ne fait pas de guerre sans munitions. Nous pouvons seulement tenir 2 semaines à Khanaqin avec ce que nous avons actuellement." Les troupes menées par Polat Talabani forment le 160ème bataillon qui a reçu une formation Delta Force sous la supervision des États-Unis en 2003. 
Cependant, ce qui manque en armement aux Pêşmerge, ceux-ci le compensent d'autant en courage et en endurance. Comme les événements des dernières semaines l'ont prouvé, aucune arme ne peut l'emporter sur la détermination sans faille des Pêşmerge. Après tout, ce n'est pas pour rien qu'ils sont appelés "Pêşmerge", ce qui signifie en kurde : "Ceux qui font face à la mort", "qui regardent la mort en face". Ce nom a été attribué à ces guerriers intrépides lors de l'établissement de la République du Kurdistan, avec Mahabad pour capitale, au Kurdistan iranien, en 1946. Le président de cette république, Qazi Mohammed, fut pendu avec les ministres de son cabinet sur la place principale de la ville, Çwarçira, condamné pour "trahison". Immédiatement après avoir pendu les "traitres", ils mirent le feu à toutes les librairies et les livres kurdes.

Proclamation de la république de Mahabad, 22 janvier 1946

Ce n'était ni la première fois, ni la dernière que des Kurdes étaient torturés, pendus ou fusillés pour "trahison" par un État envers qui ils n'avaient aucune allégeance, ni loyauté : l'Iran, la Turquie, la Syrie et l'Irak, tous ont châtié les Kurdes depuis des siècles, pour le simple fait d'être kurdes et de parler kurde, ceci en dépit du fait que "l'Irak", la "Syrie" et la "Turquie" sont des États dont l'existence est bien plus récente que l'aspiration kurde à un État, qui fut pour la première fois couchée sur le papier par Ehmedê Khanî, dans son poème d'amour épique, Mem et Zîn, vers 1695. 
On peut dire que la tolérance et l'acceptation que les Kurdes témoignent envers les minorités ethniques, en dépit de leur propre passé de discriminations, est stupéfiante. Dans les rangs des forces Pêşmerge, il y a des Assyriens, des Arméniens, des Chaldéens, des Turkmènes, des Shabaks et des Arabes qui se battent côte à côte avec leurs compatriotes kurdes pour défendre leurs familles, leurs villages et un futur paisible pour leur peuple. Le Kurdistan est une mosaïque d'ethnies et de religions :  plus de cinq églises chrétiennes, des juifs, des musulmans chiites et sunnites, et des adeptes de religions autochtones du Kurdistan, le zoroastrisme, le yézidisme, tous vivent dans un voisinage serein. Il n'y a pas beaucoup d'autres pays du Moyen Orient – s'il y en a – qui peuvent se vanter que la  cloche des églises et l'appel à la prière des mosquées peuvent se faire entendre simultanément, dans le même village. 
Enracinés dans une telle diversité, les Pêşmerge sont un exemple d'unité face au sectarisme grandissant dans le reste du Moyen Orient. Plus récemment, les Pêşmerge et le Gouvernement régional du Kurdistan (GRK) ont pris en charge un demi million de réfugiés fuyant EIIL rien qu'à Mossoul. Un nombre impressionnant, si l'on tient compte que le GRK n'a lui-même qu'une population de 5.2 millions selon ses propres chiffres officiels. 
Les Pêşmerge ne sont pas divers sur les seuls plans ethniques et religieux. Depuis les premiers temps du combat kurde pour l'indépendance, des femmes jouaient un rôle important de protection au Kurdistan contre les maraudeurs et les voleurs, quand les hommes étaient au loin. Les femmes du Kurdistan sont connues en littérature pour leur beauté séduisante, et plus encore pour leur forte personnalité et leur intelligence dans la tradition orale, comme héroïnes et femmes de bravoure dans les contes kurdes pour enfants. 

Même dans l'Histoire, des femmes ont eu au Kurdistan des positions de premier plan : Asenath Barzani fut la première femme juive et rabbin dans les premières années du 17ème siècle. L'Assyrienne (chrétienne) Margaret Shello a été la première femme à rejoindre les rangs des Pêşmerge dans les années 1960, sous le commandement du général Mustafa Barzani de retour au Kurdistan du sud, après une décennie d'exil en Union soviétique.

Margaret Shello


Le général Mustafa Barzani, qui fut à la tête de l'armée de la république du Kurdistan en 1946, est souvent cité pour avoir dit : “Şêr şêr e, çi mêr e çi nêr e”, mâle ou femelle, un lion est toujours un lion.

Qazi Mohammed et Mustafa Barzani

L'unité des Femmes d'élites a 600 recrues enregistrés, mais on ne dispose pas de chiffre précis pour savoir combien de femmes servent actuellement dans le corps des Pêşmerge, on ne peut qu'en supposer des centaines, si ce n'est des milliers. De Margaret Shello au colonel Rasheed, qui est à la tête de l'unité des Femmes d'élites, il y a eu sans doute des milliers de femmes Pêşmerge au cours de l'histoire kurde. 
Kirkouk, pierre d'achoppement lors des négociations de 1975 entre le général Barzani et Saddam Hussein, est maintenant sous contrôle kurde. Auparavant, la politique naïve d'apaisement envers les États-Unis et le gouvernement central de Bagdad a vu les Pêşmerge laisser la ville à l'armée irakienne, après l'avoir libérée de l'emprise de Saddam Hussein, à la faveur d'une politique énoncée dans l'article 140 de la constitution irakienne. Naïve car aucune des conditions inscrites dans l'article 140 de la constitution irakienne n'a été pleinement mise en œuvre depuis l'adoption de la constitution en 2005.
Les Pêşmerge contrôlent actuellement toutes les régions historiques à majorité kurde du Kurdistan du sud ou "Kurdistan irakien". Au moment où vous lisez ces lignes, des centaines de réfugiés se sont frayés une route vers la Région du Kurdistan, sûre et sereine, qui est défendue par ces braves Pêşmerge. 
En un temps où les États-Unis se méfient de la guerre et n'aident que prudemment le gouvernement irakien avec un personnel militaire pour riposter à la menace terroriste, les terroristes de l'EIIL ont fait de nouvelles avancées. La seule résistance rencontrée par les terroristes est venue des forces Pêşmerge qui ont accru leurs barrages pour défendre leur liberté, leur patrie et leur peuple. 
Les Pêşmerge sont des héros. 
Texte en anglais sur le Jerusalem Post.


Zorav Darisiro : Siberian_sun@hotmail.com

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