Les Turcs, ces grands incompris...
Il y a un article assez drôle d'Ilnur Cevik, paru le 18 septembre dans le New Anatolian. D'une drôlerie sans doute involontaire, où le journaliste se plaint d'un refroidissement dans l'attitude des Kurdes d'Irak envers les entreprises turques qui y travaillent et y investissent, en sommant le Premier Ministre du Kurdistan, Nêçirvan, de faire quelque chose, sans quoi cela pourrait détériorier les relations turco-kurdes.
Pas une seule fois Ilnur Cevik ne songe à envisager le problème par l'autre bout : à savoir que c'est peut-être les récentes menaces turques et l'absence de tout assouplissement sur la reconnaissance de la région du Kurdistan en tant qu'entité fédérale, plus les invectives gracieuses adressées aux deux présidents kurdes, ces "chefs tribaux" avec qui il n'est pas question de dialoguer, plus toutes les manoeuvres auprès des Américains et des Irakiens pour faire annuler le référendum de Kirkouk, plus les innombrables tracasseries et mesquineries à la frontière d'Ibrahim Khalil, avec files d'attente interminables, insultes racistes, confiscation de tout objet osant porter la mention d'un nom géographique commençant par "K", nom d'un pays absolument inexistant mais menaçant quand même la Turquie jusqu'aux plus obscurs tréfonds de son nationalisme, plus les reflux de voyageurs kurdes passant par la Turquie, même à l'aéroport d'Istanbul, parce qu'un gamin "osait" porter en prénom le nom géographique qui n'existe pas et qui commence par K, plus le trépignement hystérique, écumant, des autorités maritimes devant un cargo coréen dans le Bosphore qui "osait" indiquer que ses marchandises étaient à destination du pays qui n'existe pas mais dont le nom commence par K, et enfin et surtout le fait que les Turcs bombardent régulièrement depuis l'été des villages frontaliers, forçant les habitants à fuir, mais poussent des hurlements indignés en direction de la communauté internationale pour le moindre geste ou propos un peu agacé de la part de Barzani, surtout quand ce dernier laisse entendre que les Kurdes ne seraient pas enclins à se laisser faire en cas d'invasion...
Il y a quelque chose d'assez typiquement turc dans cette manie d'insulter, de menacer, de hurler à la non-existence des uns et des autres... et puis de hurler trois fois plus fort son indignation quand en représailles, on ose leur retirer le tapis rouge de sous les pieds.
Nul ne peut soupçonner Ilnur Cevik de positions bellicistes envers le Kurdistan. Il a toujours été un fervent partisan d'une reconnaissance, au moins de l'entité fédérale, du Kurdistan, mais la façon dont il dépeint les activités des sociétés turques au Kurdistan peut faire sourire. A l'en croire, ce serait presque du dévouement humanitaire sans aucun souci de profit, un vrai missionnariat :
"Quand les relations entre le KRG et la Turquie étaient assez froides, les sociétés turques ont été un pont amical entre les Kurdes d'Irak et les Turcs. Ils ont bravé les attaques terroristes (lesquelles ?) et même une administration très corrompue (qu'ils ont beaucoup arrosée eux-mêmes) afin de poursuivre leurs efforts pour développer la région du Kurdistan d'Irak."
Bien sûr, tout ceci n'était que pur altruisme et les sociétés turques ne se sont pas du tout taillé la part du lion dans ce grand boom économique... Mais l'éditorialiste poursuit avec chagrin :
"Cependant, récemment, nous avons vu avec inquiétude et tristesse que les sociétés turques commencent de quitter les zones kurdes et que les marchandises turques qui qui étaient vendues dans le nord de l'Irak sont maintenant remplacées par des produits de Jordanie, d'Iran, et d'autres provenances locales."
Déjà ça s'appelle la concurrence, les produits turcs étant assez chers, mais le fait que la Jordanie ou l'Iran ou les pays du Golfe ont beaucoup moins de problèmes avec la reconnaissance du fédéralisme et surtout de l'EXISTENCE des Kurdes, n'y est peut-être pas non plus étranger. Un Kurde d'Irak peut voyager en Egypte ou en Jordanie sans que la mention "Kurdistan" ne fasse écumer les autorités et même si les sociétés turques n'y sont pour rien, d'autant plus que cela va à l'encontre de leurs intérêts, l'insistance d'Ankara pour qu'elles négocient, notamment sur tout ce qui a trait au traitement des produits pétroliers, avec Bagdad et non Erbil, a peut-être contribué à mettre peu à peu les entreprises turques sur la touche.
Cela dit, je serais curieuse de savoir si les entreprises de Kurdes de Turquie subissent le même refroidissement. En tout cas la conclusion de l'éditorial ne manque pas de saveur :
"Les peuples frères de la région devront tôt ou tard réaliser que les seuls amis de la région qui seront toujours à même de leur tendre une main amicale sont les Turcs."
Dommage que pour le moment, la diplomatie turque, jusqu'alors menée par le nouveau président de Turquie, n'ait pas semblé très au courant de ces touchants liens de famille.
Pas une seule fois Ilnur Cevik ne songe à envisager le problème par l'autre bout : à savoir que c'est peut-être les récentes menaces turques et l'absence de tout assouplissement sur la reconnaissance de la région du Kurdistan en tant qu'entité fédérale, plus les invectives gracieuses adressées aux deux présidents kurdes, ces "chefs tribaux" avec qui il n'est pas question de dialoguer, plus toutes les manoeuvres auprès des Américains et des Irakiens pour faire annuler le référendum de Kirkouk, plus les innombrables tracasseries et mesquineries à la frontière d'Ibrahim Khalil, avec files d'attente interminables, insultes racistes, confiscation de tout objet osant porter la mention d'un nom géographique commençant par "K", nom d'un pays absolument inexistant mais menaçant quand même la Turquie jusqu'aux plus obscurs tréfonds de son nationalisme, plus les reflux de voyageurs kurdes passant par la Turquie, même à l'aéroport d'Istanbul, parce qu'un gamin "osait" porter en prénom le nom géographique qui n'existe pas et qui commence par K, plus le trépignement hystérique, écumant, des autorités maritimes devant un cargo coréen dans le Bosphore qui "osait" indiquer que ses marchandises étaient à destination du pays qui n'existe pas mais dont le nom commence par K, et enfin et surtout le fait que les Turcs bombardent régulièrement depuis l'été des villages frontaliers, forçant les habitants à fuir, mais poussent des hurlements indignés en direction de la communauté internationale pour le moindre geste ou propos un peu agacé de la part de Barzani, surtout quand ce dernier laisse entendre que les Kurdes ne seraient pas enclins à se laisser faire en cas d'invasion...
Il y a quelque chose d'assez typiquement turc dans cette manie d'insulter, de menacer, de hurler à la non-existence des uns et des autres... et puis de hurler trois fois plus fort son indignation quand en représailles, on ose leur retirer le tapis rouge de sous les pieds.
Nul ne peut soupçonner Ilnur Cevik de positions bellicistes envers le Kurdistan. Il a toujours été un fervent partisan d'une reconnaissance, au moins de l'entité fédérale, du Kurdistan, mais la façon dont il dépeint les activités des sociétés turques au Kurdistan peut faire sourire. A l'en croire, ce serait presque du dévouement humanitaire sans aucun souci de profit, un vrai missionnariat :
"Quand les relations entre le KRG et la Turquie étaient assez froides, les sociétés turques ont été un pont amical entre les Kurdes d'Irak et les Turcs. Ils ont bravé les attaques terroristes (lesquelles ?) et même une administration très corrompue (qu'ils ont beaucoup arrosée eux-mêmes) afin de poursuivre leurs efforts pour développer la région du Kurdistan d'Irak."
Bien sûr, tout ceci n'était que pur altruisme et les sociétés turques ne se sont pas du tout taillé la part du lion dans ce grand boom économique... Mais l'éditorialiste poursuit avec chagrin :
"Cependant, récemment, nous avons vu avec inquiétude et tristesse que les sociétés turques commencent de quitter les zones kurdes et que les marchandises turques qui qui étaient vendues dans le nord de l'Irak sont maintenant remplacées par des produits de Jordanie, d'Iran, et d'autres provenances locales."
Déjà ça s'appelle la concurrence, les produits turcs étant assez chers, mais le fait que la Jordanie ou l'Iran ou les pays du Golfe ont beaucoup moins de problèmes avec la reconnaissance du fédéralisme et surtout de l'EXISTENCE des Kurdes, n'y est peut-être pas non plus étranger. Un Kurde d'Irak peut voyager en Egypte ou en Jordanie sans que la mention "Kurdistan" ne fasse écumer les autorités et même si les sociétés turques n'y sont pour rien, d'autant plus que cela va à l'encontre de leurs intérêts, l'insistance d'Ankara pour qu'elles négocient, notamment sur tout ce qui a trait au traitement des produits pétroliers, avec Bagdad et non Erbil, a peut-être contribué à mettre peu à peu les entreprises turques sur la touche.
Cela dit, je serais curieuse de savoir si les entreprises de Kurdes de Turquie subissent le même refroidissement. En tout cas la conclusion de l'éditorial ne manque pas de saveur :
"Les peuples frères de la région devront tôt ou tard réaliser que les seuls amis de la région qui seront toujours à même de leur tendre une main amicale sont les Turcs."
Dommage que pour le moment, la diplomatie turque, jusqu'alors menée par le nouveau président de Turquie, n'ait pas semblé très au courant de ces touchants liens de famille.
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