Etat profond vs Guerilla obscure
Deux affaires visant à éclairer les dessous louches et obscurs de la guerre au Kurdistan de Turquie éclatent ensemble, par un hasard amusant.
Il y a d'abord la parution d'un livre autobiographique J'ai vu la Trahison, d'un colonel turc à la retraite (qui bénéficie d'une certaine immunité et donc peut raconter ce qu'il veut sans avoir à craindre de poursuites, au moins en Turquie).
Erdal Sarızeybek raconte en effet les menées des forces anti-terroristes en Turquie et donc les faits et gestes des acteurs de la "sale guerre", ce qui peut être une révélation pour un certain public turc, mais n'apprendra rien de nouveau aux Kurdes qui ont subi les agissements des barbouzes turcs pendant plus d'une décennie.
Ainsi, à Sedimli (ville qui fut encore récemment le théâtre d'une affaire de faux attentat du PKK et d'un scandale éclaboussant l'armée et les services) : Le brave colonel raconte comment il avait lui-même fait déclencher des tirs d'artillerie et de fusées dans la ville, deux ou trois nuits de suite, et comment ensuite l'armée devait tirer sur les "cibles" qu'elle avait elle-même installées. Ensuite il suffisait de rassembler la population sur la place, le matin, et de leur faire la leçon sur les conséquences qu'ils auraient à essuyer en cas d'aide aux "terroristes". Le colonel conclut que bien que cette situation de guerre mimée puisse sembler un peu folle, il reste très satisfait de son idée, car selon lui elle a évité des dégats plus importants. En fait ces attaques simulées servirent souvent de prétextes à l'armée pour détruire des villes, comme Sirnak, et commencer à vider le Kurdistan de sa population, dès 1992.
Le colonel Sarızeybek confesse aussi avoir entraîné des équipes "déguisées" en guerilleros du PKK : "la nation était en feu. Il ne se passait pas un jour sans opération. Je peux avouer qu'à un moment, nous étions dans une situation désespérée. Nous avons fait plusieurs choses. PAr exemple, nous avons formé des équipes avec des soldats qui portaient la barbe et nous les avons habillés avec les tenues du PKK. Nous les avons placés sur la route, la nuit, avec l'ordre de sécuriser la région."
Moi je veux bien que ce soit uniquement pour ne pas se faire attaquer par la guerilla, mais cela jette quand même une ombre douteuse sur certains massacres de Kurdes par le PKK, qui n'ont jamais eu l'air très clairs, et même celui de petites troupes d'appelés turcs assassinés et "mutilés" d'une façon pas très kurde non plus, mais bon, ils ont pu apprendre ces bonnes manières de l'adversaires, de même que les Peaux-Rouges ont appris le scalp des Blancs... En tout cas l'anathème ressassé jusqu'à plus soif du PKK "tueur de bébés" en prend quand même un coup : qui était qui sous le treillis ?
Si l'on y ajoute les confessions d'un autre commandant retiré des affaires, Altay Tokat, qui avait avoué, lui, avoir jeté une ou deux bombes sur les habitations de juges et de fonctionnaires pas assez coopératifs, ça jette comme un froid. Akin Birdal, ancien président de la Ligue des droits de l'homme en Turqui, qui a lui-même fait l'objet d'une tentative d'assassinat, et actuel député du DTP, accuse : "Il y a eu beaucoup de plaintes et d'indices. On a dit que des soldats ayant revêtu l'uniforme du PKK et se présentant comme membres du PKK faisaient des raids dans les maisons, et demandant aux gens de les soutenir. Et s'ils recevaient de l'aide, les gens étaient alors accusés de complicité et de soutien (à la guerilla). Si les gens refusaient de les aider, ils étaient torturés, maltraités ou tués." Pile je gagne, face tu perds, quoi. (source Kurdish Aspects).
Coïncidence, une autre affaire est rapporté dans le New Anatolian : le PKK, jaloux et vexé du succès de l'AKP aux dernières élections aurait projeté l'assassinat de plusieurs maires du DTP, selon des sources kurdes "émanant de Diyarbekir et Mardin". Le coup aurait été double pour l'organisation : faire porter le chapeau au gouvernement turc en disant aux électeurs kurdes : "Voyez le véritable visage du Parti que vous avez élu", et peut-être, aussi, se débarrasser de politiciens kurdes qui, bien que DTP, sont peut-être jugés trop indociles ou pas assez "dans la ligne" ou peut-être jugés trop intègres ou trop soucieux du bien-être de la popualtion locale, aux yeux des commandants planqués dans les montagnes. De plus, il y a en ce moment, au sein du PKK, un courant qui tend à faire porter la responsabilité de la défaite électorale du DTP sur les maires de ce parti (c'est très PKK ça, de trouver un bouc émissaire, de préférence loin de la hiérarchie). Ce serait donc la piètre gestion de ces élus qui aurait détourné le peuple du Parti, et pas du tout le programme, les volte-faces et altermoiements selon les directives toujours changeantes des bureaux politiques. Il est vrai aussi que sur le terrain, une certaine collusion entre élus, DTP, autorités turques et mafia ne fait guère l'unanimité dans certains districts kurdes.
En tout cas, une détente dans les régions kurdes, une démocratisation et une amélioration de la Question ne peuvent faire l'affaire ni du PKK, ni de " l'Etat profond". Il y a donc des collaborations fortuites qui s'imposent d'elles-mêmes.
Il y a d'abord la parution d'un livre autobiographique J'ai vu la Trahison, d'un colonel turc à la retraite (qui bénéficie d'une certaine immunité et donc peut raconter ce qu'il veut sans avoir à craindre de poursuites, au moins en Turquie).
Erdal Sarızeybek raconte en effet les menées des forces anti-terroristes en Turquie et donc les faits et gestes des acteurs de la "sale guerre", ce qui peut être une révélation pour un certain public turc, mais n'apprendra rien de nouveau aux Kurdes qui ont subi les agissements des barbouzes turcs pendant plus d'une décennie.
Ainsi, à Sedimli (ville qui fut encore récemment le théâtre d'une affaire de faux attentat du PKK et d'un scandale éclaboussant l'armée et les services) : Le brave colonel raconte comment il avait lui-même fait déclencher des tirs d'artillerie et de fusées dans la ville, deux ou trois nuits de suite, et comment ensuite l'armée devait tirer sur les "cibles" qu'elle avait elle-même installées. Ensuite il suffisait de rassembler la population sur la place, le matin, et de leur faire la leçon sur les conséquences qu'ils auraient à essuyer en cas d'aide aux "terroristes". Le colonel conclut que bien que cette situation de guerre mimée puisse sembler un peu folle, il reste très satisfait de son idée, car selon lui elle a évité des dégats plus importants. En fait ces attaques simulées servirent souvent de prétextes à l'armée pour détruire des villes, comme Sirnak, et commencer à vider le Kurdistan de sa population, dès 1992.
Le colonel Sarızeybek confesse aussi avoir entraîné des équipes "déguisées" en guerilleros du PKK : "la nation était en feu. Il ne se passait pas un jour sans opération. Je peux avouer qu'à un moment, nous étions dans une situation désespérée. Nous avons fait plusieurs choses. PAr exemple, nous avons formé des équipes avec des soldats qui portaient la barbe et nous les avons habillés avec les tenues du PKK. Nous les avons placés sur la route, la nuit, avec l'ordre de sécuriser la région."
Moi je veux bien que ce soit uniquement pour ne pas se faire attaquer par la guerilla, mais cela jette quand même une ombre douteuse sur certains massacres de Kurdes par le PKK, qui n'ont jamais eu l'air très clairs, et même celui de petites troupes d'appelés turcs assassinés et "mutilés" d'une façon pas très kurde non plus, mais bon, ils ont pu apprendre ces bonnes manières de l'adversaires, de même que les Peaux-Rouges ont appris le scalp des Blancs... En tout cas l'anathème ressassé jusqu'à plus soif du PKK "tueur de bébés" en prend quand même un coup : qui était qui sous le treillis ?
Si l'on y ajoute les confessions d'un autre commandant retiré des affaires, Altay Tokat, qui avait avoué, lui, avoir jeté une ou deux bombes sur les habitations de juges et de fonctionnaires pas assez coopératifs, ça jette comme un froid. Akin Birdal, ancien président de la Ligue des droits de l'homme en Turqui, qui a lui-même fait l'objet d'une tentative d'assassinat, et actuel député du DTP, accuse : "Il y a eu beaucoup de plaintes et d'indices. On a dit que des soldats ayant revêtu l'uniforme du PKK et se présentant comme membres du PKK faisaient des raids dans les maisons, et demandant aux gens de les soutenir. Et s'ils recevaient de l'aide, les gens étaient alors accusés de complicité et de soutien (à la guerilla). Si les gens refusaient de les aider, ils étaient torturés, maltraités ou tués." Pile je gagne, face tu perds, quoi. (source Kurdish Aspects).
Coïncidence, une autre affaire est rapporté dans le New Anatolian : le PKK, jaloux et vexé du succès de l'AKP aux dernières élections aurait projeté l'assassinat de plusieurs maires du DTP, selon des sources kurdes "émanant de Diyarbekir et Mardin". Le coup aurait été double pour l'organisation : faire porter le chapeau au gouvernement turc en disant aux électeurs kurdes : "Voyez le véritable visage du Parti que vous avez élu", et peut-être, aussi, se débarrasser de politiciens kurdes qui, bien que DTP, sont peut-être jugés trop indociles ou pas assez "dans la ligne" ou peut-être jugés trop intègres ou trop soucieux du bien-être de la popualtion locale, aux yeux des commandants planqués dans les montagnes. De plus, il y a en ce moment, au sein du PKK, un courant qui tend à faire porter la responsabilité de la défaite électorale du DTP sur les maires de ce parti (c'est très PKK ça, de trouver un bouc émissaire, de préférence loin de la hiérarchie). Ce serait donc la piètre gestion de ces élus qui aurait détourné le peuple du Parti, et pas du tout le programme, les volte-faces et altermoiements selon les directives toujours changeantes des bureaux politiques. Il est vrai aussi que sur le terrain, une certaine collusion entre élus, DTP, autorités turques et mafia ne fait guère l'unanimité dans certains districts kurdes.
En tout cas, une détente dans les régions kurdes, une démocratisation et une amélioration de la Question ne peuvent faire l'affaire ni du PKK, ni de " l'Etat profond". Il y a donc des collaborations fortuites qui s'imposent d'elles-mêmes.
On retrouve la patte de Baskın Oran dans la thèse de l'union hasardeuse entre les méchants de l'état profond et les méchants du PKK. Je trouve que c'est très faible parce que ça part du postulat qu'il y a les méchants et les gentils. Ceux qui aiment la guerre et la destruction et ceux qui veulent la paix et le bien-être. C'est manichéen et ça n'aide pas à comprendre. De plus, ça ne se vérifie pas dans la réalité : les "démocrates" ne sont pas si démocrates que ça par exemple.
RépondreSupprimerDe plus, on ne peut pas critiquer le PKK à la fois pour les délires de Turquie démocratique et de confédérationnisme bienveillant de son leader et à la fois pour sa tendance "Chaos theory". À un moment, ça ne colle plus.
Enfin, un point qui est très vrai : faire ses mémoires et tout balancer est devenu la mode. On m'a rapporté que l'ex-capitaine de l'armée Zeki Bingöl a raconté récemment (pas plus d'un mois et demi) dans un bouquin comment des prisonnières avaient été brûlées vives par les forces armées turques lors de l'assaut contre le mouvement des grèves de la faim en décembre 2000.
La presse turque avaient ressassé en jurant ses grands dieux qu'il s'agissait d'actes d'immolation "typiques des militants jusqu'au-boutiste d'extrême-gauche". Une thèse embrassée sans critique par les médias occidentaux à l'époque. Je me rappelle très bien qu'Euronews notamment l'avait répercutée.
Un peu partout la vérité revient à la surface, il suffit de voir l'affaire Hrant Dink. Mais ce n'est que l'exemple le mieux connu. De quoi inviter à lire la presse turque avec la plus grande circonspection.
CE TEXTE NE REFLETE PAS DU TOUT LA VERİTE. On vous vonseille de lire le livre nomme comme suit, '' J'ai vu la trahison'' en turc,''İHANETİ GÖRDÜM''si vous voulez etre au courant de ce quı se passe chez nous.
RépondreSupprimerRespectueusement
Barberose
Ce serait sans doute très intéressant à lire mais je suis kurdophone et non turcophone. Donc j'attendrai pour cela une traduction en français, en anglais ou en kurmancî.
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