Manifestations au Kurdistan d'Irak : les demandes en 17 points du Parlement d'Erbil
En attendant la journée de protestation de demain, qui concernera tout l'Irak, la manifestation d'hier à Halabja a fait un mort, cette fois un policier, tandis qu'un autre était blessé, sans que l'on sache clairement s'ils ont été victimes d'un 'tir ami' c'est-à-dire de balles malencontreuses émanant des forces de l'ordre, ou si, comme accuse le maire de la ville, des manifestants étaient armés (ce que ces derniers nient). Goran Adhem affirme même être en possession de vidéos prouvant ses accusations et parle même de perturbateurs arabes venus d'Irak.
Cette version (ou paranoïa) d'infiltrations étrangères à la Région est relayée par les services kurdes parlant d'agents iraniens à l'origine des troubles, tel Ismat Argushi, de la Sécurité nationale, qui affirme être en possession d'informations précises sur la pénétration de 'terroristes' venant d'autres régions d'Irak et même de l'étranger. Le gouverneur d'Erbil, en prévision du 25, a annoncé des mesures pour fermer la Région au reste de l'Irak durant la manifestation, ainsi que la route menant de Suleymaniye à Erbil, mais qui doit passer par Kirkouk (et donc hors Région).
Quant au fondement véritable de ces affirmations, il n'y a pas lieu de douter que les Kurdes, officiels ou non, y croient réellement : l'opinion courante au Kurdistan est que le pays est entouré d'ennemis (pas faux) et que toutes les dissensions entre Kurdes sont plus ou moins inspirées, du moins encouragées par des États voisins (ce qui, historiquement, s'est plusieurs fois vérifié). Maintenant, agiter la menace de 'cinquième colonne' terroristes, arabes ou iraniennes, a aussi l'avantage de continuer de faire peser sur Goran l'accusation d'être vendu à l'Iran et peut-être d'inciter la population kurde à prendre ses distances avec le mouvement, par peur de faire le jeu des puissances hostiles au Kurdistan.
En attendant, Erbil se prépare demain aux manifestations avec des mesures de sécurité renforcée. Les cortèges d'étudiants qui avaient protesté contre l'assassinat de Serdeşt Osman n'avaient pas dégénéré en affrontements, malgré des jets de chaussures contre le Parlement, mais le climat est cette fois-ci plus tendu, même si la majorité des Kurdes ne souhaitent pas de bains de sang.
Réunis lui aussi en urgence, le parlement d'Erbil (qui comprend des députés de Goran), a adopté une résolution en 17 points, condamnant les violences du 17 février, tant de la part des manifestants que du PDK. Cette résolution est présentée comme unanime, mais il semble que Goran se soit ensuite rétracté ou qu'il y ait eu malentendu (ou cafouillage) car son groupe parlementaire nie avoir signé. Son porte-parole, Kardo Mohammed, explique ce refus par le fait que leurs revendications n'ont pas été prises en compte dans le texte et que son parti fera une déclaration séparée, mais plus tard.
Dans ce texte donc, le Parlement d'Erbil :
1. Condamne, interdit et déclare criminel la violence et l'usage d'armes à feu contre les citoyens, l'attaque contre les bureaux gouvernementaux et ceux des partis politiques, ainsi que toute nuisance aux biens publiques et privés.
2. Demande le retrait immédiat de toutes les forces mobiles qui ont été envoyées le 17 février à Suleymaniye ou dans d'autres villes du Kurdistan, et leur retour dans leur bases initiales.
3. Demande la libération de tous ceux qui sont détenus en raison de leur participation aux manifestations ; les auteurs de crimes doivent être remis aux mains de la police et de la justice.
4. Le gouvernement doit, en accord avec la loi, indemniser toutes les personnes, partis et institutions qui ont subi des dommages lors des attaques et des violences.
5. Demande que la protection et l'organisation des manifestations soit du seul ressort des forces de polices intérieures et des gardiens de la paix. L'identité de ces forces (nom, carte d'identité et lieu de travail) doivent être publiques et personne ne doit masquer son visage ou aveugler les fenêtres des véhicules.
6. Les Peshmerga doivent être interdits de participation à tout conflit politique interne et doivent exercer leurs missions nationales en protégeant le peuple du Kurdistan.
7. Il est nécessaire d'instituer une commission d'enquête gouvernementale dirigée par un magistrat de la Cour de Cassation, et composée de personnalités indépendantes et de professionnelles, qui devra rendre publiques ses conclusions dès que possible.
8. Il y a eu des défaillances dans la gestion de la situation par police et les Asayish (forces de sécurité) dont les responsables devront être légalement poursuivis après les conclusions de l'enquête.
9. Aucun manifestant ne doit être détenu pour sa participation sans procédure légale.
10. La décision d'envoyer des forces militaires ne doit être prise qu'en cas de danger extérieur.
11. Les auteurs de l'incendie de la chaîne Nalia et de la radio Gorran devront être poursuivis et jugés immédiatement.
12. Dans le but de réformes générales et radicales, des propositions devront être élaborées par les blocs et les commissions parlementaires, avec l'aide du Conseil des ministres, en partenariat avec les partis politiques, les organisations civiles, les universitaires et des personnalités indépendantes. Ces propositions devront être présentées au Parlement pour y être débattues et leur application mise en œuvre dès que possible.
13. Le gouvernement doit immédiatement prendre une série de mesures importantes et urgentes pour améliorer la vie quotidienne de la population, instaurer une justice sociale et accroître les droits et libertés politiques.
14. Toutes les parties doivent jouer leur rôle pour calmer la situation et mettre fin aux attaques des media par les partis politiques.
15. Appelle le Premier Ministre, le ministre de l'Intérieur et le ministre des Peshmerga à être entendus par le Parlement, pour des clarifications et des questions, conformément aux dispositions et procédures légales.
16. Veut organiser et soutenir un dialogue politique national entre les partis politiques et les organismes qui ont des représentants au Parlement du Kurdistan, afin d'instaurer une entente politique et juridique permettant de modifier les lois qui ont des dimensions politiques et nationales.
17. Demande la création d'une commission spéciale composée de tous les blocs parlementaires afin d'enquêter et de permettre des auditions, à la demande des manifestants.
Texte kurde sur Peyamner.
Un billet bienvenu Sandrine.
RépondreSupprimerSinon, la main de l'Iran, je veux bien (on adore l'ennemi extérieur dans toute la région !). Mais le mécontentement existe bel et bien. L'arrogance des nouveaux super riches, ça finit par agacer et ça fait un bail que la jeunesse kurde est branchée sur Internet et sur les chaînes de TV internationales.
Sinon, qu'est-ce qu'ils leur a pris à Suleymaniye de tirer ainsi à balles réelles sur les émeutiers ?
Le type (ou les types) qui a tiré en premier le 17 était un garde du PDK qui a pu paniquer et a tirer (en l'air ou non) devant les assaillants. Après le rôle de la sécurité qui vient ensuite, et pourquoi et par qui le cortège a été détourné par des 'casseurs', et est-ce que les UPK ont tout fait pour protéger les bureaux des copains, hum, tout ça est à débrouiller. Une chose est sûre, au Kurdistan même les mariages font des victimes avec leur manie de la gâchette facile. Alors de ce point de vue là, pour le moment, le nombre des victimes est peu élevé on aurait pu avoir pire. Pourvu que ça dure ! La majorité des Kurdes, par chance, ne semblent pas souhaiter un bain de sang. Si ça secoue le Parlement et le GRK c'est très bien.
RépondreSupprimerMerci pour la traduction,
RépondreSupprimerAujourd'hui la place était encore pleine ( au moins 15 000 selon les sources), ce ne sont plus seulement des jeunes mais une bonne partie de la ville qui ose manifester. A Hewlêr défilé de pick up (monika comme les appellent les Kurdes) pro PDK...
Il faut aussi que le parti arrête, la famille Barzani n'est pas la seul à avoir souffert de saddam, ce ne sont pas les seuls à avoir donné des sehid... Ils n'ont tellement pas d'argument qu'ils n'ont qu'a ressortir " vous préférez l'époque du baath?" Ce qui est sur c'est que ce sont bien eux en grande partie qui ont profités de la situation actuelle du Kurdistan.
On peut être pour un Kurdistan plus juste, plus socialiste, plus solidaire avec les voisins Kurdes, contre la mainmise d'une famille sur la richesse du pays et aimer son pays. Nous aussi nous avons donné des sehid, mais pas pour avoir un Kurdistan comme ça. Je suis pour un grand changement et je ne suis ni goran, ni un pantin de l'iran...
Comment expliquer que pendant 1 mois les universités soient fermés???????
Ca chauffe aussi à Kirkuk où les arabes en profitent pour s'attaquer aux Kurdes, là dessus l'unité doit prendre le dessus.