mardi, août 20, 2013

Quelles écritures pour quelles lectures ?






"Nous avons vu à quel point une étude ethnopoétique du théâtre modifie en profondeur les rapports à partir desquels on le conçoit généralement par la place qu'elle accorde à l'oralité. Mais que faire avec les autres textes anciens, grecs et latins, qui ne sont pas des transcriptions de performances orales ? Faut-il les assimiler à de la littérature moderne et les abandonner à la critique littéraire ?
Faire une étude ethnopoétique d'énoncés écrits destinés à une oralisation dans le cadre d'un rituel social – le théâtre, l'éloquence ou la poésie de banquet – est relativement facile. C'est moins évident quand il s'agit d'énoncés écrits qui ne sont pas en rapport pragmatique avec une organisation – lecture ou récitation – ritualisée. L'écriture "littéraire" échapperait-elle à l'analyse ethnologique en tant que pratique culturelle ? La littérature serait-elle trop moderne, même quand il s'agit de Rome et de la Grèce, pour concerner l'anthropologie ? 
On retrouve ici le grand partage que dénonce Michel de Certeau entre l'écrit et l'oral, la modernité et la tradition, l'histoire et le mythe. La difficulté est toujours d'articuler des écrits qui sont appelés, à tort, littérature avec l'anthropologie et l'ethnomusicologie.
Déconstruisons d'abord le grand partage.  L'histoire de l'écriture, encore un grand récit mystifiant, pose qu'à l'origine était l'oralité. Les civilisations commenceraient toutes par une forme de mémoire orale avant d'accéder à ce progrès qu'est l'écriture – sous entendue alphabétique. Première idée reçue. La tradition orale déformerait le passé, l'écriture le conserverait fidèlement. Autre idée reçue : l'écriture est une pure technique qui, une fois acquise, s'imposerait avec évidence et remplacerait automatiquement la tradition orale. Là où l'écriture est absente, c'est qu'elle n'aurait pas encore été inventée ni importée. Comme si l'écriture et l'oralité étaient les deux faces d'une même pratique de mémoire : conserver tels quels les mots, les phrases, les vers. Or, si c'est bien le but d'une certaine forme d'écriture qui enregistre un énoncé et le transmet verbatim, la transmission orale actualise ce qu'elle transmet ; jamais tout à`fait semblable, elle se déploie en toutes sortes de variations." 
[ Exemple de ces variations qui se déploient, que tout un chacun connaît (c'est moi qui ajoute) :

"La surprise d’un barbare (nous appelions ainsi tous les gens qui ne savaient pas ce qu’avait de particulier le samedi) qui, étant venu à onze heures pour parler à mon père, nous avait trouvés à table, était une des choses qui, dans sa vie, avaient le plus égayé Françoise. Mais si elle trouvait amusant que le visiteur interloqué ne sût pas que nous déjeunions plus tôt le samedi, elle trouvait plus comique encore (tout en sympathisant du fond du cœur avec ce chauvinisme étroit) que mon père, lui, n’eût pas eu l’idée que ce barbare pouvait l’ignorer et eût répondu sans autre explication à son étonnement de nous voir déjà dans la salle à manger : « Mais voyons, c’est samedi ! » Parvenue à ce point de son récit, elle essuyait des larmes d’hilarité et pour accroître le plaisir qu’elle éprouvait, elle prolongeait le dialogue, inventait ce qu’avait répondu le visiteur à qui ce « samedi » n’expliquait rien. Et bien loin de nous plaindre de ses additions, elles ne nous suffisaient pas encore et nous disions : « Mais il me semblait qu’il avait dit aussi autre chose. C’était plus long la première fois quand vous l’avez raconté." 
Du Côté de chez Swann, Marcel Proust.  ]

"C'est pourquoi cette formule rebattue d'Amadou Hampâté Bâ – "En Afrique, un vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle" – est insupportable. Elle plaque le modèle occidental de la bibliothèque sur une mémoire africaine dramatisée. Ce sage vieillard n'avait donc rien transmis à ses enfants, ses élèves, ses disciples ? Et à quoi servent les bibliothèques pour les savoirs qui ne peuvent être transmis que par l'initiation comme les Véda ?
D'autres, comme Jacky Goody, affirment que, sans le support de l'écriture – ce que Goody appelle la raison graphique –, il est impossible d'accéder à une pensée abstraite. Affirmation symptomatique de l'arrogance occidentale dont il a été démontré qu'elle était sans fondement. 
Bien des idées sont à revoir. Aucune culture n'est totalement orale ni totalement écrite. Et l'usage d'une écriture ne s'inscrit pas dans le grand récit de l'évolution technique et intellectuelle de l'humanité. Il faut pour chaque culture, chaque époque, définir l'usage et la nature de l'une et l'autre pratiques, et établir la relation entre elles, en Grèce et à Rome, comme partout. À l'histoire de l'écriture, il faut substituer l'anthropologie des écritures et des lectures.
Chaque écriture trouve sa raison d'être dans une pratique de lecture. Ainsi l'écriture française contemporaine est-elle faussement alphabétique ; elle ne sert pas uniquement à oraliser un écrit par la lecture, sinon elle serait phonétique ; son orthographe compliquée tient à ce qu'elle est aussi une grammaire et une histoire. L'orthographe fait voir des paradigmes qui ne s'entendent pas, comme le pluriel en s, ou la conjugaison des verbes (il mange/ils mangent). L'étymologie, vraie ou fausse, fait ajouter des lettres inaudibles comme dans "algorithme".
On ne lit pas aujourd'hui comme on lisait dans l'Antiquité, on n'écrit pas non plus pour les mêmes raisons.
Le statut de l'écriture chez Homère est un cas d'école. Certains raisonnent de cette façon : si le texte homérique mentionne l'existence de l'écriture, rien ne s'oppose à l'hypothèse que l'Iliade et l'Odyssée aient été des poèmes écrits. Raisonner ainsi suppose que l'écriture soit une technique autonome et non une pratique culturelle. Pour éviter ce genre de conclusion hâtive, il faut regarder à quoi sert l'écriture chez Homère, si elle est une façon de mémoriser le chant de l'aède. Une écriture peut être présente sans qu'elle soit automatiquement utilisée pour consigner ou produire ce que nous appelons aujourd'hui des œuvres littéraires.
Florence Dupont : L'Antiquité, territoire des écarts, 7. "Quelles écritures pour quelles lectures ?"


Très heureuse de lire ça, car cela m'a toujours bassinée d'entendre le lieu commun d'une 'culture kurde, restée très longtemps orale' (alors que les premiers écrits kurdes connus remontent au XVIe siècle, à peu près à l'époque où l'on commence d'écrire en turc, sous prétexte que la majorité des Kurdes étaient illettrés. Or, quand on lit Mehmûd Beyazîdî, ce n'est pas cette impression qui ressort, même pour les fillettes : "Les filles aussi étudient et le mollah leur donne aussi des leçons").

Quand bien même 80% des Kurdes du temps d'Ehemdê Xanî auraient été illettrés, est-ce que l'on applique le même qualificatif 'essentiellement orale' à la culture française sous les Bourbons, au vu de l'écrasante majorité de la classe paysanne, ni plus ni moins lettrée que les Kurdes à la même époque ?

La question du partage discutable entre oralité-écriture se pose pour toutes les cultures du monde, qui ne sont "ni totalement écrites, ni totalement orales". Les poésies et récits des dengbêj sont-ils si différents   dans leur forme et leur destination des poésies et récits de Melayê Cizirî, Ehemedê Xanî ou Feqî Teyran ? Leurs œuvres étaient-elles vouées à une lecture seulement muette ou aussi récitées ? N'étaient-elles que lues ou bien aussi mémorisées ?


Florence Dupont mentionne ensuite la pratique du messager porteur d'une missive muette :

Qu'en est-il chez Homère ? On y trouve, dans un seul passage, un usage bien particulier de l'écriture sur des tablettes. Il y est raconté comment Proétos envoie Bellérophon chez le roi de Lycie pour que celui-ci le tue à son arrivée. Dans ce but, il lui donne des tablettes repliées, c'est-à-dire fermées par une ficelle scellée à la cire, sur lesquelles il a écrit l'ordre de le tuer, et qu'il doit remettre à son hôte. Ce message est appelé sêma, c'est-à-dire "objet signifiant". Le principe du message, ignoré du messager, se retrouve chez Hérodote : le message d'Hastée à Aristagoras a, tatoué sur la tête et caché sous les cheveux qui ont repoussé un message secret qui enjoint au gouverneur de Milet de se révolter contre le Grand Roi. Le texte grec utilise là aussi la notion de message : "les tatouages lui signifiaient (esêmaine)…" Il faut remarquer que ce sont les mots inscrits qui parlent et non le messager. L'écriture est dans ces ceux cas une façon d'autonomiser la parole, de la réduire à un message.
L'écriture chez Homère est donc une ruse et non pas une pratique courante pour communiquer à distance, car à quoi bon écrire un message que le messager peut transmettre oralement ? L'écriture n'intervient que là où la communication habituelle orale n'est pas possible. Les tablettes de Bellérophon et l'inscription sur le crâne de l'esclave ont la même fonction : se substituer à un messager exceptionnellement muet pour dire ce qu'il ne peut pas ou ne doit pas dire. "

Or cette "ruse de l'écriture' fut aussi utilisée par les Kurdes, mais de façon totalement inverse, la teneur véritable et secrète du message étant orale, et l'écriture, vue comme dangereuse, car susceptible d'être lue par d'autres que son destinataire, n'était là que pour attester de la fiabilité du messager et de l'identité de l'auteur du message, comme le relate Mehmûd Beyazîdî (Adat u rasumatnameye Akradiye, Saint-Petersbourg, 1860) :

"Supposons qu’il arrive une affaire qui oblige un Kurde à écrire. Il ne dira jamais explicitement de quoi il s’agit dans un papier, de peur que cela ne tombe dans une main étrangère et que cette affaire soit ensuite connue, et que ce papier, dans la main de cette personne, serve de preuve. Aussi, dans ce papier, ils écrivent des salutations et des prières et mentionnent que le porteur de ce papier est sûr, qu’on peut lui faire confiance et s’en remettre à lui. Et la réponse écrite dans la prudence et le secret, on va la dire oralement au messager. Et ce messager repart et fait son rapport à l’autre homme. Il est impossible que chez les Kurdes une affaire dangereuse soit mentionnée ou exposée sur le papier, ils sont méfiants. Et le papier, sans un sceau, chez les Kurdes, n’a aucune valeur. Il doit y avoir un sceau, absolument."

Mais il s'agit, là encore, de faire dire, par écrit ce que le messager ne peut pas fournir par lui-même : Ici la véracité du message qu'il va délivrer et sa propre honnêteté : l'écriture n'est pas le support des propos mémorisés, elle n'est pas une technique épistolaire, elle ne sert que comme un sceau, une signature.

Pourtant, un peu auparavant, il faut noter cette contradiction apparente chez l'auteur quand il dit :

"Les billets ou les documents écrits sont rares entre les Kurdes. Mais ils prennent des témoins. Ils ne se fient pas à l’écriture ou aux sceaux mais les témoins sont nécessaires."
 Or dans le cas du "porteur de message, c'est bel et bien le support écrit qui sert de sceau de confiance pour étayer les propos du messager.

Il faut imaginer qu'il ne s'agissait pas des mêmes types de documents ni surtout des mêmes circonstances : lorsqu'il y a accords ou contrats publiques, qui ont vocation à être connus de tous et le plus vite possible (ventes, mariages, dédommagements) la mémoire des témoins est préférée : elle est immédiate, multipliée par le nombre de témoins, et sera transmise ensuite oralement à tous les descendants, alors qu'un document écrit se falsifie, s'égaye, se détruit, se déchire.

Lorsqu'il y a un document à délivrer à distance, ou qui doit rester secret, le sceau, comme le tatouage de Bellérophon, intervient "là où la communication habituelle orale n'est pas possible", c'est-à-dire hors assemblée publique. Il y a ainsi retournement de l'attestation et de l'attesté. Dans le premier cas, ce sont les témoins-narrateurs qui cautionnent le document (même s'il n'est pas écrit, un accord est toujours 'rédigé' dans des clauses plus ou moins strictes), dans le second cas, c'est le document écrit qui sert de  sceau au narrateur et à son message.

Cette "ruse de l'écriture'  utilisée par les Kurdes, mais de façon totalement opposée, avait un résultat en vue qui était strictement le même : la délivrance d'un message secret, en toute sûreté. Là aussi, le recours à l'écriture et/ou à l'oralité ne devait donc pas être tranché ni immuable, et se modelait, selon les circonstances ou d'un point de vue pratique.


samedi, août 17, 2013

De la mystique de l'amour en islam

Dimanche 18 août à 7 h 05 : Avec Salah Stétié. Les Racines du Ciel, Frédéric Lenoir (rediffusion).

mardi, août 13, 2013

Il était une fois en Anatolie

Mercredi 14 août à 22 h 35 sur Ciné+ Club : Il était une fois en anatolie, de Nuri Bilge Ceylan (Turquie, 2011) ;


Au cœur des steppes d’Anatolie, un meurtrier tente de guider une équipe de policiers vers l’endroit où il a enterré le corps de sa victime. Au cours de ce périple, une série d’indices sur ce qui s’est vraiment passé fait progressivement surface.



"C'est comme cela que je considère l'existence humaine."
Nuri Bilge Ceylan



mercredi, août 07, 2013

Du premier nettoyage ethnique des chrétiens d'Orient

Paradoxe que l'arrivée de la Première Croisade en 1099 a vidé la Syrie de ses chrétiens (et de ses juifs), ce que n'avait pas du tout fait la conquête musulmane au VIIe siècle :

"Jérusalem qui doit se bâtir sur des ruines peine en revanche d'abord à se repeupler : "la sainte terre de Jérusalem demeurait toujours sans population." Quatre quartiers principaux organisaient la ville de la fin du XIe siècle : au nord-est, le quartier juif dont les habitants sont massacrés lors de l'assaut chrétien, les rares survivants étant vendus comme esclaves. ; au sud-est , le quartier musulman, lui aussi vidé de sa population ; au nord-ouest, le quartier du patriarche avec en son centre le Saint-Sépulcre ; au sud-ouest, les rues des chrétiens orientaux qui avaient été persécutés, chassés, tués à mesure que progressait l'armée des croisés : "leur nombre se trouvait presque réduit à rien depuis l'époque de l'entrée des Latins en Syrie." Entre les murs solides édifiés au temps des Byzantins et des Fatimides, et que les chrétiens se contentent de restaurer en 1116 et 1117, la ville est vide : pas de juifs ou de musulmans car "ce serait sacrilège de les autoriser à résider dans un lieu si vénérable" ; si peu de chrétiens qu'ils "suffisent à peine à remplir une des rues de la ville". Une "désolation", et c'est bien ce que déplorent nos textes. Un "nettoyage ethnique", ont préféré écrire certaines historiens modernes. Les oiseaux, disait Albert d'Aix, un temps rassemblés, se sont envolés ; les autres ne font que passer, ces pèlerins qui, pour la majorité repartent, une fois les "saints lieux" visités. D'autant que, même si les chroniqueurs ne nous le disent pas, les Latins préfèrent à la Ville sainte les cités portuaires ! À partir de 1115, le roi Baudouin Ier entreprend donc de favoriser l'installation de chrétiens venus d'outre-Jourdain ; ils "arrivent avec femmes, enfants, gros et menu bétail" et des quartiers leurs sont attribués. Une politique que poursuit son successeur. En 1120, Baudouin II accorde "aux Syriens, aux Grecs, aux Arméniens et à tous les hommes habitants de ces pays, même aux Sarrasins, la libre permission d'apporter dans la cité sainte et sans avoir à craindre aucune exaction, du froment, de l'orge et toute espèce de légumes. Il remit aussi la taxe que l'on prélevait d'ordinaire sur les boissons et les pesées" : plus d'octroi donc, plus de droits sur les poids et mesures pour favoriser le ravitaillement, aider à l'animation du marché, stimuler le peuplement. C'est que le roi ne cesse de rechercher, "avec le plus grand zèle, les moyens d'augmenter la population de la ville agréable au Seigneur, et d'y attirer sans cesse de nouveaux habitants."

Finalement, au milieu du XIIe siècle, en raison de l'afflux de pèlerins (qui n'y restent pas mais y dépensent et font des dons), Jérusalem a "récupéré le niveau de population qui était le sien avant la croisade, et la hausse se poursuit encore."

Si la reconquête ayyoubide a pu amoindrir un temps le peuplement chrétien, Jérusalem se remplit à nouveau de ses musulmans et de ses juifs. Ni les Mongols ni Tamerlan n'entrèrent dans la ville et il fallu attendre la peste noire de 1348 pour à nouveau vider la ville (et tout le Moyen-Orient d'au moins un tiers de sa population).



Un charmant détail de la fabrication des tapis turcs

– Un charmant détail de la fabrication des tapis turcs. Il n'est pas rare, quand on les examine de tout près, de découvrir au milieu des laines éclatantes une petite mèche de cheveux. C'est la mèche des cheveux que se coupe la femme turque, en son travail à la maison, le jour tombant, pour à défaut d'autre marque, arrêter et se remémorer la tâche de sa journée.
Edmond de Goncourt : Journal des Goncourt, Deuxième série, deuxième volume, Mémoires de la vie littéraire. 

mardi, août 06, 2013

The Hunter




Mercredu 7 août à 22 h 15 sur ARTE : The Hunter (Shekarchi), de Rafi Pitts, Iran, 2010.

"Téhéran 2009, Ali récemment libéré de prison est veilleur de nuit dans une usine. Il vit à contretemps de sa femme et sa fille. Lorsqu’elles disparaissent dans les émeutes qui secouent la ville, Ali devient le chasseur, poursuivant froidement de sa haine un ennemi insaisissable, caché au cœur des villes aussi bien qu'en lui même."

Latins des villes, Kurdes des campagnes



On sait qu'une interprétation longtemps domina, en lien direct avec de telles considérations démographiques. Même renforcées par l'apport d'immigrants, les Latins se seraient fixés majoritairement dans les villes, créant avec le temps une société originale. En somme, aux Latin, les villes et les châteaux contrôlant les vastes et dangereux districts intérieurs, aux autres, chrétiens orientaux, mais surtout Turcs, Kurdes, Arabes, les formes du peuplement rural. Or, une telle vision est largement dépendante des descriptions à fort contenu idéologique que les chroniqueurs diffusèrent. Les sources narratives ont fabriqué et imposé une image dont la prégnance s'est longtemps exercé sur les historiens, prisonniers peut-être des mêmes enjeux idéologiques, et sensibles de ce fait à cette peinture de guerriers et de pionniers courageux, combattant pour leur foi, mais cerné par mille périls dans les quelques enclaves qui étaient les leurs. Lorsque Guillaume de Tyr remémore par exemple les difficiles débuts du royaume et qu'il dépeint des campagnes toutes cultivées par les Infidèles, se refusant à travailler aux champs pour faire périr de faim les chrétiens, il compose un tableau peut-être exact mais qui ne fut pas pérenne. Il n'empêche. Longtemps, les Francs furent décrits installés dans les villes, accrochés à leurs châteaux et forteresses.


The Not Lindsay Kurdish Rug



"Someone had been in here. 
The sign was so subtle that at first he couldn't isolated it. He closed his eyes, then opened them and let them swing casually about his combination living-room/kitchenette, trying to take in everything. The books he'd been planning to leave behind hadn't been moved around on the shelves; the chairs were where they had been,one under the lamp and the other by the room's only window, with its scenic view of the alley outside; the coffee cup and the toast plate were still in the dish drainer beside the tiny sink. 
Then it cliked home, as such thing usually did if you didn't push too hard. It was the rug. What he thought of as his Not Lindsay rug.  
About five feet long and two wide, Not Lindsay was a repeating diamond pattern in blue, red, white, and brown. He had bought it in Baghdad, but had been assured by an Iraqi policeman he trusted it was of Kurdish manufacture. "Very old, very beautiful," the policeman has said. His name was Latif and al-Khaliq Hassan. A good troop. "Look Turkey, but no-no-no." Big grin. White teeth. A week after that day in the marketplace, a sniper's bullet had blown Latif abd al-Khaliq Hassan's brains right out through the back of his head. "Not Turkey, Iraqi !" 
The rug-merchant wore a yellow tee-shirt that had said DON'T SHOOT ME, I'M ONLY THE PIANO PLAYER. Latif listened to him, nodding. They laughed together. Then the merchant had made a startlingly American jackoff gesture and they laughed even harder.
"What was about ?" Barbie has asked. 
"He says American senator bought five like these. Lindsay Graham. Five rug, five hundred dollar. Five hundred out front, for press. More on the down-low. But all senator rug-fake. Yes-yes-yes. This one not fake, this one real. I, Latif Hassan, tell you this, Barbie. Not Lindsay Graham rug." 
Latif has raised his hand and Barbie slapped him five. That had been a good day. Hot, but good. He had bought the rug for two hundred dollars American and an all-territories Coby DVD player. Not Lindsay was his one souvenir of Iraq, and he never stepped on it. He always stepped around it. He had planned to leave it behind when he left The Mill, but fat chance of that. Wherever you went, there you were. The great Zen truth of the age. 
He hadn't stepped on it, he was superstitious about that, he always detoured around it, as if to step on it would activate some computer in Washington and he would find himself back in Baghdad or fucking Fallujah. But somebody had, because Not Lindsay was mussed. Wrinkled. And a little crooked. It had been perfectly straight when he left this morning, a thousand years ago."

dimanche, août 04, 2013

Uzak



Lundi 5 août à 22 h 45 sur Ciné+ Club : Uzak de Nuri Bilge Ceylan.


Synopsis : Un photographe est persuadé que l'écart entre sa vie et ses idéaux est en train de grandir. Il se retrouve obligé d'accueillir une jeune personne de sa famille, qui a quitté son village pour trouver du travail sur un bateau, dans le but de partir à l'étranger.

De l'autre côté





Lundi 5 août à 20 h 45 sur Ciné+ Club, film de Fatih Akin (Auf der anderen Seite, All./Tur., 2009) : 
Malgré les réticences de son fils Nejat, Ali, veuf, décide de vivre avec Yeter, une prostituée d'origine turque comme lui. Mais Nejat, jeune prof d'allemand, se prend d'affection pour Yeter lorsqu'il comprend qu'elle envoie son argent à sa fille en Turquie, pour lui payer des études. La mort accidentelle de Yeter éloigne durablement le père de son fils. Nejat se rend à Istanbul dans l'espoir de retrouver la trace d'Ayten, la fille de Yeter. A Hambourg, Ayten sympathise avec Lotte, une étudiante allemande aussitôt séduite par le charme et l'engagement politique de la jeune Turque. Lotte propose même à Ayten de l'héberger chez elle, malgré les réticences de sa mère, Susanne. Arrêtée et placée en détention, Ayten est finalement reconduite à la frontière puis incarcérée en Turquie. Sur un coup de tête, Lotte décide de tout abandonner et de se rendre en Turquie.


samedi, août 03, 2013

Esprit d'Arménie

Lundi 4 août à 12 h 35 sur France Musique : Esprit d'Arménie, mélodies, plaintes et danses, chants patriotiques et d'amour ; Festival musique et histoire de Fontfroide, du 16 juillet 2013. Avec Georgi Minasyan, Haïg Sarikouyoumdjian : hautbois ; Gaguik Mouradian : vièle ; Armen Badalyan : percussions ;  Hespèrion XXI, dir. et viole de gambe : Jordi Savall.


Concert de soutien à l'Institut kurde