vendredi, février 29, 2008

Turquie : déjà le retrait ?

Le PKK, via son porte-parole a annoncé un "retrait limité" de l'armée turque "de la région frontalière de Zap", a-t-il dit. "Nous constatons des mouvements militaires, comme l'entrée de camions militaires vides en provenance de Turquie, qui repartent pour la Turquie avec à bord des soldats".

La veille, le même porte-parole a indiqué que quelques 200 soldats turcs se sont retrouvés encerclés dans une vallée à 10 kilomètres de la frontière. Les assiégés assiégeant en somme, et cette nouvelle a, semble-t-il, été confirmé par les peshmergas, devenus, malgré eux, des observateurs privilégiés. Ce qui est sûr, c'est que les communiqués triomphants de l'armée sont loin de refléter la réalité, à savoir que c'est peut-être, une fois de plus, la montagne kurde qui va vaincre, ajouté au fait que les bases de Qandil connaissent évidemment bien mieux le terrain que les Turcs. En tout cas, si 200 soldats turcs sont amenés à se rendre au lieu de se faire tuer glorieusement sur place, ça risque d'engorger drôlement les prisons et les tribunaux militaires de Turquie.

Le ministre des Affaires étrangères irakien, le kurde Hoshyar Zebarî, est encore plus catégorique en annonçant carrément la fin de l'incursion turque. De son côté, l'armée turque n'a ni démenti ni confirmé, cela prendra peut-être le temps qu'il lui faut à annoncer la perte d'un hélicoptère pour expliquer que si elle se retire, c'est en fait parce qu'elle a gagné (un peu comme en Syrie on fête encore la victoire de 1973 sur Israël).

Bilan de l'attaque ?

- Des Kurdes d'Irak très remontés contre la Turquie. Si l'on se penche sur quelques rumeurs (et les rumeurs sont toujours intéressantes même si invérifiables, ou carrément fausses, car elles témoignent d'un état d'esprit), deux groupes de pershmergas auraient, selon le site Kurdistannet.info, outrepassé les ordres du GRK et se seraient battus avec le PKK. Vrai ou non, cela donne un indice de l'état d'esprit qui prévalait parmi les troupes kurdes et la population.

De même, l'accusation des forces turques selon laquelle les hôpitaux du Kurdistan d'Irak avaient recueilli et soigné des guerilleros du PKK blessés au combat. Accusation démentie, bien évidemment par le GRK, mais il est évident qu'aucun Kurde d'Irak, quels que soient son poste et sa fonction, commandant militaire, gouverneur, directeur d'hôpital ou maire de village, n'aurait été livrer un Kurde blessé aux mains des Turcs ni même l'aurait laissé mourir sans soin... Surtout que les vidéos et les photos qui circulent sur le web, montrant comment les soldats turcs prennent la peine de découper soigneusement la tête des cadavres kurdes afin de les emporter en trophée, témoignent là aussi de l'exquise humanité avec laquelle tout prisonnier kurde tombé en leurs mains peut être traité.

- Un ressentiment accru des Kurdes de Turquie. Pas trop couvertes par la presse turque, ni par la presse occidentale, les manifestations de soutien au PKK et de colère contre Ankara dans le Kurdistan de Turquie ont été surtout traitées par les médias kurdes, qui naturellement ont parlé de rassemblements de 10 000 voire 20 000 personnes à Diyarbakir ou Van, ce qui semble beaucoup. Mais on ne peut même pas faire la part des chiffres préfecture-manifestants vu que la préfecture n'annonce aucune manif. Par contre al-Jazeera montre des images, de part et d'autre de la frontière : d'abord un reportage sur les chrétiens du Kurdistan qui se prennent les bombes et affirment que ces villages, qui viennent tout juste d'être reconstruits, n'ont jamais vu de PKK. Puis on voit un micro-trottoir à Diyarbakir, avec des jeunes très remontés et visage masqué, un homme (visage découvert) qui parle des tortures qu'il a subies, une femme dont la fille est morte au combat dans la montagne. Visiblement, on n'a pas la même approche de "l'opération de nettoyage", à Diyarbakir ou Van qu'à Ankara ou Trabzon.

Mais même la presse turque la plus objective et modérée se plante lourdement quand elle veut analyser le nationalisme kurde. Ainsi, Mustafa Aykol, dans TDN, distingue les Kurdes "non-nationalistes", ceux qui voudraient rester en Turquie mais jouirent de droits culturels et d'une meilleure situation économique et les "nationalistes", lesquels se voient comme une nation partagée (ce qui, de fait, est vrai). Ces derniers seraient les radicaux pro-PKK. Or c'est faux, le PKK n'est plus indépendantiste depuis longtemps et les "nationalistes" ou "indépendantistes" kurdes aujourd'hui, s'il en est, ne doivent guère goûter les programmes de réconciliation turco-kurde lancés sous des modes variés et souvent contradictoires par Öcalan, le DTP ou le PKK.

De même, Aykol, pour recenser les "bons" Kurdes (pas indépendantistes) des "mauvais" (indépendantistes) se fient à ceux qui ont voté AKP. Là encore, c'est une grille de lecture erronée. Les votes kurdes en faveur de l'AKP n'ont rien à voir avec le souhait ou non de rester en Turquie, mais résidaient dans l'espoir d'une sortie de la guerre, d'un assouplissement de "l'occupation" militaro-policière qui perdure encore par beaucoup d'aspects, et dans celui de bénéficier du programme d'aide économique en faveur des plus pauvres, qui est un grand succès électoral de l'AKP. Quant aux voix indépendantistes kurdes, je ne vois pas comment elles pourraient être être comptabilisées politiquement, puisqu'aucun parti ni mouvement quelconque, à l'heure actuelle, ne peut exprimer ce genre de souhait sans automatiquement tomber sous le coup de la loi.

On peut d'ailleurs parier que beaucoup de Kurdes ne savent pas, aujourd'hui, s'ils sont ou non "sécessionnistes," tant c'est une idée abstraite et loin de leurs difficultés immédiates. La question ne se pose pas en ces termes, pour eux. Disons que ce genre d'action qui ne sert militairement à rien, s'il agace les Kurdes d'Irak et indigne l'ensemble des Kurdes, tous pays compris, peut accélérer un état de fait et d'esprit, qui n'est même pas une "rupture" entre Turcs et Kurdes, car quand ont-ils été vraiment unis depuis 1923 ? En tout cas, en ce moment, moins que jamais.

jeudi, février 28, 2008

Histoire de Farzad Kamangar


Farzad Kamangar est né en 1975. Il a été enseignant durant 12 années à Kamiaran, au Kurdistan d'Iran. Il est marié et père de famille. Il était membre du syndicat des enseignants et d'autres associations militantes. Il écrivait pour la revue Royan, de l'Education de Mamiyaran et pour les journaux d'associations de droits de l'Homme locales.

Il a été arrêté le 19 août 2006, à Sanandaj (Sine) par les services secrets. Durant les 4 mois qui suivirent son arrestation, sa famille n'eut aucune nouvelle et les autorités niaient être pour quoi que ce soit dans sa disparition.

Farzad Kamangar avait été en fait transféré dans la Prison n° 9 d'Evin de Téhéran, un centre de détention secret, non-officiel du VEVAK, les services secrets iranien, dignes successeurs de la SAVAK du Shah. Des activistes pour les droits de l'Homme en Iran, faisant état d'une lettre que l'enseignant a fait sortir clandestinement de sa cellule, racontent qu'il fut tenu au secret et isolé, en même temps que torturé gravement. Il rapporte ainsi avoir été battu avec un tuyau de jardin, lors d'un interrogatoire, pour la seule raison qu'il était Kurde. Il est resté aussi 24 heures attaché sur une chaise, dans un espace extrêmement restreint, dans une immobilité complète, sans nourriture ni pouvoir aller aux toilettes. Il fut ensuite emprisonné dans une cellule minuscule et sans air, sans voir aucun avocat ni avoir de contact avec sa famille. Il a aussi été soumis à un chantage psychologique, notamment des menaces de représailles sur les siens et l'arrestation d'une jeune fille avec qui il était lié. Il a alors commis une tentative de suicide en se jetant du haut d'un escalier, mais échoua à se tuer. Son état était si mauvais qu'il dut être soigné dans un hopital pour détenus. Son avocat confirme ses déclarations en faisant état de la mauvaise condition physique de son client lors de leur première entrevue. En plus de graves brûlures aux mains due à l'eau bouillante, il souffre aussi d'une infection rénale et de sang dans les urines. ‎

Entre 2006 et 2007, il fut plusieurs fois transféré soit à Kermanshan soit à Sine (Sanandaj) pour être torturé et interrogé. Il mentionne ainsi que sa cellule à Kermanshan, où il resta en février et mars 2007 mesurait 1m x 1m x 0.6m. Il fut également torturé et battu, en plus de sévices sexuels, spécialité de la prison Evin, entre autre, visant à briser psychologiquement les détenus.

Ce n'est que sept mois plus tard que sa mère et son frère furent alors autorisés à le voir, pour un temps très court, en présence d'agents de renseignement, qui les leur interdirent de parler kurde durant l'entretien. Farzad Kamangar n'avait toujours pas eu connaissance des chefs d'accusation que l'on portait contre lui et n'avait pu rencontrer son avocat, qui n'avait aucune information sur son dossier. Finalement, il sut plus tard être accusé de "miner la sécurité nationale".

Farzad a fait plusieurs grèves de la faim, avec d'autres détenus, pour protester contre ses conditions de détention et a dû être hospitalisé à plusieurs reprises. Le mois dernier, il était à la prison de Gohardacht. La prison était alors secouée par une révolte des prisonniers et, après une intervention musclée des services, il fut emmené et séparés des autres, avec Farhad Vakili et Ali Heydaran ces trois-là ont été emmenés et séparés de leurs compagnons.

Le 25 février, soit lundi dernier, la Branche 130 de la Cour révolutionnaire d'Iran a condamné Farzad Kamangar à mort pour atteinte à la sécurité nationale, en l'accusant d'être membre du PJAK. L'accusé plaidait non coupable. Son avocat a souligné l'irrégularité du procès, qui n'était pas public et sans la présence de jurés.

Human Rights Watch dénonce ce procès, la sentence et les tortures infligées au prisonnier et s'élève contre l'exécution prochaine de ce prisonnier

mercredi, février 27, 2008

Radio

Dimanche 2 mars à 15h00 sur France Culture : Peuples et langues minoritaires : Approche globale. Avec le géographe Roland Breton, auteur de l'Atlas des minorités dans le monde et de l'Atlas des langues du monde (Autrement). Tout un monde, M.H. Fraissié.
à 18h00 : Exégèse et critique des Ecritures, avec Geneviève Gobillot et Danielle Delmaire, coordinatrices d'Exégèse et critique des textes sacrés. Judaisme, christianisme, islam, hier et aujourd'hui (Geuthner). Cultures d'islam, A. Meddeb.

Ankara-Qandil : guerre des médias et des chiffres

Après quelques jours d'incursion turque au Kurdistan d'Irak, l'armée turque annonce plus de cent PKK tués, et avoue moins de 20 soldat turcs tués. Le PKK, de son côté, en est à 81, voire cent soldats turcs tués, parlant de "cent sacs à cadavres" qui ont transité par l'aéroport militaire de Diyarbakir, et un hélicoptère de dégommé. L'armée turque reconnait la perte de l'hélico mais parle plutôt d'un "accident technique" à cause indéterminée. Roj TV annonce que les images de l'hélicoptère abattu seront disponibles. Le PKK pointe aussi le manque de préparation des soldats au froid des montagnes et annonce que trois soldats sont morts gelés, et ont été rendus par les peshmergas aux Turcs. Naturellement, le PKK parle de "catastrophe" militaire pour les Turcs, alors que l'armée turque crie victoire ou presque, et mentionne de "lourdes pertes" parmi le PKK. L'armée recommande aussi aux citoyens turcs de n'écouter que ses communiqués à elle et ne pas se fier aux bilans défaitistes de l'ennemi, ce qui tombe sous le sens.

Dans tout cela, la vérité sur les chiffres respectifs des dégâts humains n'apparaîtra sans doute pas dans l'immédiat, à moins d'une déroute complète de l'armée, le PKK restant toujours très secret sur ses pertes et ses mouvements.

Quant aux objectifs de l'intervention, il est évident que le PKK ne sera pas éradiqué et de toute façon, est-ce l'intérêt des Turcs, qui préfèrent plutôt envoyer de lourds signaux à la Région du Kurdistan d'Irak, afin de leur montrer qu'ils ont l'intention d'être à nouveau partie prenante dans le destin des Kurdes d'Irak, alors qu'ils s'en étaient eux-mêmes écartés quand le Parlement turc avait refusé le passage des troupes américaines sur leur sol en 2003 ? De ce fait, détruire 5 ponts au Kurdistan n'est pas un acte commis pour gêner le PKK, qui ne se déplace pas avec des véhicules sur les routes goudronnées. Dans une dépêche d'Asia News, Monseigneur Rabban, l'évêque d'Amadiyya, pousse là dessus une bonne gueulante en soulignant qu'il est impossible aux Turcs de prétendre qu'en bombardant les routes et les villages chrétiens, il s'agit d'une opération contre le PKK :

"Ne permettez pas que les avions turcs continuent à violer le ciel du Kurdistan et à bombarder son territoire; les seuls à souffrir sont les civils innocents (...) Ces gens fuient à nouveau la violence et la peur, c'est le prix de l’agression que nous sommes en train de subir (et) sont en train de détruire tout ce que nous avions péniblement reconstruit ces dernières années" (...) J'ai vu de mes propres yeux 6 avions turcs attaquer un village chrétien où l'on n'a jamais vu d'installations militaires". (source Asia News)

Le GRK ne s'y trompe pas, qui voit plutôt un rapprochement turco-américain , que ce soit contre l'Iran ou par inquiétude d'une annexion anticipée de Kirkouk, laquelle pourrait avoir lieu en juin ou en juillet prochain. Aussi, le Parlement kurde a demandé le retrait des bases turques installées là depuis 1997, et qui, il y a quelques jours, ont été prises à partie par la population, alors que les peshmergas, qui ont la consigne de ne pas tirer, sauf en cas d'attaque contre les civils, n'ont pas bougé, se contentant de bloquer leurs vélléités de "sortie". Le sentiment des Kurdes d'Irak, même ceux, et ils sont nombreux, qui ne sont pas fans du PKK qui s'est livré, à la fin des années 90, à de graves exactions contre les villageois kurdes, lesquels souffrent aujourd'hui des représailles turques, est une haine grandissante contre les Turcs (un sentiment qui, de toute façon, était déjà là, et pas seulement parmi les Kurdes, mais aussi parmi les Chrétiens et même les Arabes, pour des raisons que la Turquie va mettre des décennies encore à comprendre, alors même que les victimes de l'Anfal en veulent plus aux Baassistes qu'au monde arabe en soi). On voit aussi un rejet de l'alliance américaine, qui trois fois trahit les Kurdes d'Irak depuis 1975.

Le PKK, de toute façon, a déjà commencé son repli en Iran. Peut-être même cela va-t-il accélérer une nouvelle alliance avec Téhéran (ce qui, du coup, annoncera sans doute une sacrée purge politique parmi le PJAK, mais bon...).

La Turquie sera peut-être tentée de laisser une présence militaire à l'intérieur de la frontière kurdo-irakienne. Dans ce cas là, le GRK n'aura pas fini de fermer les yeux sur les attaques du PKK contre ces soldats. Le prochain volet à observer est aussi la capacité que garde ou non le PKK à soulever la population kurde en Turquie, et particulièrement les jeunes, en des serhildan analogues à celui de Cizre ou de Hakkari, ou bien à ceux que connait régulièrement la Syrie depuis 2004. Pour ce qui concerne la question kurde en Turquie, il n'est pas sûr que "vider" le Kurdistan d'Irak des bases du PKK soit à la longue payant, si ses actions se poursuivent à l'intérieur de la Turquie, car cela donnerait raison aux arguments de Massoud Barzani et de tout le GRK, quand ils disent que le PKK est un problème interne à la Turquie. Enfin, les pertes humaines au sein du PKK le renforcent, comme tout mouvement dopé par le martyre, le sacrifice et la position de victime démunie face à un Etat oppresseur. Sinon, il y a belle lurette que les actions militaires d'Israël auraient éradiqué le problème palestinien. Par contre, trop de morts sans résultat vraiment visible peut finir par nuire à la Turquie, si les pertes au combat apparaissent inutiles. D'autant plus que, si Israël offre, face au monde arabe, l'image d'une armée qui se soucie de préserver ses soldats, de récupérer ses prisonniers morts ou vifs, on ne peut pas dire que l'armée turque soit une armée qui aime et défend ses soldats, les employant plutôt comme chair à canon, bonne à fournir d'émouvantes cérémonies funèbres, mais fustigeant ceux qui ont eu le mauvais goût de se rendre et d'en revenir vivant.

De leur côté, les USA qui ont donné l'aval pour une intervention courte, lâcheront peut-être (légèrement) la Turquie si elle s'enlise. En fait, la question est peut-être de savoir qui les USA vont lâcher en premier : le GRK ou les Turcs. Il est évident que le poids militaire et économique de la Turquie doit l'emporter mais à la faveur des élections américaines et d'un changement possible de politique en Irak, qui pousserait à un retrait, l'arbitrage américain entre les factions chiites, sunnites et les Kurdes peut aussi changer, pour le bien ou le grand dam de ces derniers.

mardi, février 26, 2008

La Cuisine kurde


Il n'est pas fréquent de signaler, sur ce blog, des parutions en langue étrangère, mais je signale tout de même, le remarquable petit livre de Mirella Galletti, sur la cuisine kurde méridionale, écrit en collaboration avec Fuad Rahman, Kurde de Kirkuk, qui tient le restaurant Kirkuk Caffè à Turin, "meilleur restaurant de cuisine kurde en Europe", à ce qu'on me dit. En tout cas le livre est passionnant, comprenant, en plus des recettes, des études sur tous les aspects de la cuisine dans la vie quotidienne des Kurdes, des mentions dans la littérature kurde, la description de voyageurs tel Marco Polo, la description des aliments de base, l'environnement des Kurdes, et même quelques recettes aphrodisiaques... Bref, un livre qu'il serait passionnant et indispensable de traduire...



Kurdistan - Cucina e tradizioni del popolo curdo
di: Mirella Galletti, Fuad Rahman

"La strenua resistenza dei 32 milioni di curdi all’assimilazione, la loro emarginazione politica, sociale e culturale hanno determinato tensioni e contraccolpi di ampia portata nell’area in cui vivono, mostrando quanto sia limitativo relegare ad un ruolo di minoranza etnica un popolo transnazionale che dal punto di vista numerico è il quarto del Vicino e Medio Oriente, dopo arabi, persiani e turchi.

Probabilmente è l’etnia più numerosa che, a livello mondiale, non abbia ancora costituito un proprio stato. Un popolo che ha una unità etnica, culturale e sociale temprata nei millenni e che da oltre un secolo e mezzo con ricorrenti lotte e rivolte persegue il raggiungimento dell’unificazione politica o almeno il riconoscimento della sua specificità.

Il questo volume l’identità curda viene esaminata attraverso la quotidianità del millenario rito della cucina e delle tradizioni, anche letterarie, ad essa collegate.

Mirella Galletti è docente di Storia dei Paesi islamici presso l’Università di Napoli. E’ autrice di numerosi articoli e libri sulla cultura e storia dei curdi e del Kurdistan. Ha recentemente pubblicato “Storia della Siria contemporanea” (2006).

Fuad Rahman, originario del Kirkuk, nel Kurdistan iracheno, si occupa di ristorazione ed ha aperto a Torino il Kirkuk Caffè, locale di specialità culinarie curde, arabe, persiane, turche.
Ananke Edizioni."

"In primavera il montone, in autunno l'uva, in inverno ci sono io, questo detto Curdo sintetizza l'opinione femminile sulle piacevolezze e il rapporto della popolazione con la produzione di cibo in base alle staggioni. Un altro proverbio afferma "Fortuna rapida : vigna e montoni", per indicare che nel Kurdistan la coltivazione della vigna e l'allevamento del montone permettono di realizzare notevoli profitti nelle annate favorevoli.

L'allevamento degli ovini e la coltivazione delle vigne rappresentano dal Neolotico ad oggi i due settori su cui si basano l'economia e l'alimentazione del Kurdistan.

La cultura culinaria curda è molto diversificata in base al territorio e all' economia locale.

I curdi vivono in un'area che si espande dai monti Zagros al deserto siriano. Alla fine del XIX secolo molti vivevano ancora allo stato nomade e seminomade, poi questo fenomeno si è molto ridotto. oggi i curdi abitano sopratutto nelle città e nei villaggi, dediti all'agricoltura e alla pastorizia. Nell'economia tradizionale le donne sono responsabili della lavorazione dei prodotti animali, come la mungitura, e della macinatura del frumento. I curdi vivono in interazione e reciproca influenza con le popozioni non curde presenti nel Kurdistan (armeni, assiro-caldei, turcomanni e nel passato gli ebrei), che ne influenzano la società e la cultura, e quindi anche la cucina.

Gli alimenti curdi sono simili a quelli utilizzati nelle cucine araba, persiana e turca ; spessi le diverse tradizioni gastronomiche sono rielaborate in maniera originale. Inoltre i cibi curdi, pur avendo lo stesso nome nelle varie aree del Kurdistan, differiscono tra di loro per la cottura e gli ingredienti utilizzati. Alcuni piatti sono legati a particolari località o festivita."

Table des chapitres

Prefazione di Chef Kumalé
Premessa

I Parte
Alimentazione tradizionale, donne e cultura nel Kurdistan

Curdi e Kurdistan
-Dalle origini alla divisione del Kurdistan
- La regione dei genocidi

Cibo e territorio
- Origini della cucina curda
- Cibo e religione : le prescrizione
- Cibo e lavoro femminile
- Alimenti tradizionali del Kurdistan
- Svolgimento del pranzo
- Cibi delle feste
- Cibi e salute
- Cibi curdi nelle varie aree del Kurdistan
- Alimenti curdi in relazione ai cibi degli altri popoli del Kurdistan (armeni, assiro-caldei ed ebrei)
- Alimenti curdi in relazione ai cibi dei popoli limitrofi (arabi, persiani e turchi)

La cucina oggi
- Come è cambiata l'alimentazione nel Kurdistan alla fine del XX secolo
- Diaspora curda e cibo dei paesi ospiti : l'esperienza di un decennio in Piemonte

II Parte
L'arte culinaria curda nella letteratura

Lingua et letteratura curde
- Poesie e brani letterari curdi su banchetti e cibi tradizionali
- Poesia popolare curda :
Elogio della fanciulla
Mella
- Pagine dalla letteratura curda :
Ahmedê Khanî
Il principe
Coppiere ! Versa il vino nella coppa
Ereb Shemo
Il castello di Dimdim

Cibo e ospitalità :
- Le esperienze dei viaggotori italiani ed europei
Marco Polo
Leonhart Rauwolff
Gerolamo Vecchietti
Pietro della Valle
Giuseppe Campanile
Lori cibi
De' prodotti del Kurdistan
Alessandro de Bianchi
Giuseppe Anaclerio

III Parte
Le ricette tradizionali curde

Fuad Rahman
Scheda : alimenti base, carne, ingredienti, spezie
- Pane (nan)
- Riso (birinc), grano (sawer), legumi (danêwele)
- Verdure (sewze) e legumi (riwek)
- Antipasti (muqqabilât) e insalate ( zelate)
- Zuppe (shorbe)
- Piatti principale (xwardinî serekî)
- Carni (gosht)
- Pesce (masî)
- Uova (hêlke) e frittate (hêlke w ron)
- Sottaceti (turshiyat)
- Yogurt (mast) e formaggi (penîr)
- Dolci (shîrînî)
- Bevande (xwardinewe)
- Piatti "afrodisiaci"

Glossario
Bibliografia
Indice dei nomi.

samedi, février 23, 2008

Coup de projo sur : Matthaios Tsahourides et la lyre pontique







Qu'est-ce que la lyre pontique ? Une vièle, de la famille des kemençe donc, utilisée par les Lazes et les Grecs du Pont. Matthaios Tsahouridès le Grec et les deux Kurdes Hussein Zahawy (daf) et Ardeshir Kamkar (kemençe) improvisent là-dessus et cela donne un résultat si convaincant qu'on n'a même pas l'impression d'un "métissage" de musique à la World. Il est vrai qu'entre le Pont-Euxin à l'Iran, il y a une région, entre mer Noire et Caspienne, où l'on chercherait en vain une frontière sûre et franche.
Matthaios Tsahourides a une prédilection pour la lyre du Pont mais joue aussi du violon, du luth grec, du 'ud, du bouzouk, de la guitare, du kemençe, du rebab afghan et de la ghitchak uzbek. Bref, quel instrument traditionnel à cordes lui reste étranger ? Et en plus de ça, ce qui ne gâte rien, beau garçon, avec ses faux airs à la Kenneth Branagh... Bref, un régal des oreilles et de la vue.

vendredi, février 22, 2008

Où l'on reparle du cas Kamal Qadir

La loi sur le journalisme qui avait été votée par le Parlement kurde, avant que Massoud Barzani ne renonce à la signer, sous la pression des journalistes et leurs syndicats, comprenait un article (10.2B) qui interdisait entre autres, textuellement, tout propos ou atteinte "relatif à la vie privée, même si c'est vrai, si cela vise à insulter." J'adore le "même si c'est vrai", il me fait toujours rire...



Ce matin, dans ekurd.net, je parcours machinalement un post sur Kamal Qadir, dont le contenu me dit vaguement quelque chose... Evidemment, cela avait été publié l'an dernier il y a deux ans sur Roj Bash et sur ce blog... Apparemment, à l'époque j'avais été la seule à relever que le contenu des attaques du "Voltaire kurde" aurait été de même attaqué en justice dans n'importe quel pays démocratique se devant de protéger ses citoyens de calomnies ou d'atteintes à la vie privée... Finalement, après un an, ça fait le tour dans les esprits? Je reposte ici le texte publié en janvier de l'an dernier, par commodité :

"En gros, les mésaventures de Kamal Qadir peuvent se résumer ainsi. Il écrit depuis des années des articles fustigeant la corruption et le népotisme du gouvernement kurde, alignant pour cela des faits probablement très vérifiables et indubitables. N'est-ce pas son droit selon les critères de la liberté d'expression ?

Et de ce fait, durant son emprisonnement il a bénéficié de la défense et du soutien non seulement des voix kurdes au nom de la démocratie, mais aussi de grandes ONG spécialisées dans les droits de l'Homme et de la liberté d'expression, comme Amnesty et Reporter sans Frontière. Le Gouvernement autrichien s'est naturellement soucié du sort d'un de ses ressortissants.

Comme on le voit, à première vue, cela apparaît comme un combat "intellectuels progressistes-démocrates" vs "gouvernement rétrograde et arbitraire"... Les premiers ont gagné, Kamal Qadir a été libéré, la morale est sauve.

Sauf que... personne n'a noté que la teneur des "insultes" proférées à l'encontre de certains membres de la famille Barzani contrevenait aussi à cet esprit démocratique, pro-droits de l'Homme, qui veut, en tous cas selon les critères occidentaux sur lesquels Qadir et ses partisans se sont appuyés pour le faire libérer, que nul se soit inquiété pour ses opinions religieuses, politiques... ou choix de vie sexuels.

Or, en traitant certain membre de la famille Barzani d'homosexuel à titre d'injure, ce même "Dr. Qadir" tombe sous le coup de l'atteinte à la vie privée et du délit d'homophobie, ce qui, selon les critères de la dméocratie occidentale, tombe aussi sous le coup de la loi, l'homophobie est en effet de nos jours, dans la plupart des pays européens, un fait qui suscite autant de réprobation que l'injure raciste. Dire, comme le fait ce journaliste du New York Times que Qadir a enfreint certaines limites dans l'insulte d'une façon qui n'est pas admise au Moyen-Orient n'est pas faux, mais on peut douter qu'en Autriche il puisse publier un papier accusant d'homosexualité les membres du gouvernement autrichien. Par ailleurs, s'il publiait en Europe de tels propos, il serait probablement attaqué en justice par toute une pléiade d'association de défenses des Gays et Lesbiennes, qui n'aiment guère qu'on utilise leurs penchants sexuels en termes d'insultes et d'armes politiques.

Par conséquent, une fois revenu en Autriche, Qadir pourrait, en toute logique, être attaqué en justice au nom de ces mêmes droits et libertés qui l'ont fait sortir de prison au Kurdistan...

On le voit, dans cette affaire qui oppose de façon intéressante deux mondes, deux échelles de valeurs, le camp des progressistes droidlomistes et les "vieilles" sociétés orientales, "corrompues" et "chatouilleuses" sur le qu'en dira-t-on sexuel, le principal protagoniste, la "victime" si l'ont veut est aussi assise sur deux chaises, en appelant d'un côté aux principes de liberté, et de l'autre en bafouant ces mêmes principes qui veulent que chacun soit libre de mener sa vie sexuelle comme il l'entend, si elle ne nuit à personne. Le "Dr Qadir" présente donc un cas intéressant de ces intellectuels à demi-occidentalisé, se réclamant tantôt des normes démocratiques et libertaires en vigueur en Europe, et ayant tantôt aux vieilles attaques et stigmatisations "féodales" dans leur mode de pensée et d'expression écrite.

Kamal Qadir a aussi qualifié de maquereau Massrur Barzani, le chef des services secrets kurdes, les Parastin, en l'accusant d'utiliser des prostitués pour leurs renseignements. Mais alors là, le seul commentaire qu'on puisse faire, c'est que ce genre de pratique n'est pas franchement l'apanage des services kurdes. A vrai dire, je me demande quels services secrets n'utilisent pas cette source d'information, vieille comme le monde..."


Rappelons les faits : il y a un an Kamal Qadir, pour avoir insulté sexuellement à peu près tout le Kurdistan d'Irak est arrêté et normalement aurait dû être condamné pour calomnie, atteinte à la vie privée, etc. Coup de théâtre, le GRK, furieux, fait peser sur lui les charges de complot contre la sûreté de l'Etat et il se prend deux fois 15 ans. Ce qui fait beaucoup, tout de même. Après une certaine campagne et une pression des milieux extérieurs, Massoud Barzani le gracie et le fout dehors. Hop, retour en Autriche. On en entend plus parler un certain temps, jusqu'à cette semaine, où il aurait été attaqué par balles par Masrour Barzani, celui qu'il avait traité de "maquereau", venu tout spécialement à Vienne pour le tuer. Ce qui me semble un peu gros, mais bon, si c'est le cas, j'ai honte pour lui. Car il est plus grave d'être idiot à ce point que maquereau quand on est chef de réseau...

Mini-manoeuvre turque stoppée à Amadiyya

Alors qu'une opération terrestre turque est "en cours" au Kurdistan d'Irak des tanks turcs se sont fait encercler par les peshmergas qui ont menacé d'ouvrir le feu. Non, il ne s'agissait pas d'un franchissement de frontière mais d'un mouvement des troupes turques installées là depuis 1997, à la faveur de la guerre civile, après la grande offensive de 1996, où la Turquie soutenazit le PDK et l'Iran l'UPK et le PKK.

Bref, près de Bamarnê, les blindés ayant fait mine de sortir et de se départir de leur statut d'observateurs,,ilsn'ont pu avancer au delà de 5 km, les troupes kurdes les ayant encerclés pour stopper leurs manoeuvres. Les camps se sont regardés en chiens de faïence pendant une heure et demi, avant que les Turcs ne décident de rentrer sagement au bercail de leur base, laquelle reste surveillée par les soldats kurdes.

Pendant ce temps là, de la Turquie, des avions bombardaient des zones montagneuses près d'Amadiyya et auraient détruit des ponts sur le Grand Zab, de source kurde (2 ou 4 selon les sources).

Par ailleurs, Abdullag Gul, le président turc, a appelé Jalal Talabani, le président d'Irak, alors que ce dernier venait d'arriver à Suleymanieh, son fief kurde. Selon les sources UPK, Abdullah Gul aurait renouvelé ses protestations d'amitié et de fraternité kurdo-turque, souhaitant le renforcement des liens économiques entre la Turquie et le Kurdistan. Il a aussi invité Jalal Talabani en Turquie.

(source NetKurd)

jeudi, février 21, 2008

Nouvelles en vrac et en bref

  • Insoucieux de trahison (voire commentaire dont on ne sait si son obscénité l'emporte sur sa connerie ou l'inverse) le ministère de la Culture du Gouvernement régional du Kurdistan vient d'ouvrir un Centre de culture araméenne à Ankawa. Felek ad-Din Kakay a aussi annoncé qu'un amendement de la loi permettait à son ministère d'ouvrir un département de culture araméenne et un autre pour les Turkmènes. Par ailleurs, même si ce n'est pas encore officiellement annoncé, ce même ministère projette d'ouvrir un Centre de culture turkmène à Kirkouk, pour des raisons évidentes de stratégie politique mais aussi de cohésion sociale assez intelligente.

  • Pendant ce temps, à Ankara, on a frôlé l'incident diplomatique. Parce que le président du Sénégal était en visite officielle, les avenues principales de la capitale arboraient les couleurs de ce pays... qui ont le malheur d'être au nombre de trois : vert, jaune, rouge. Du coup les services de police ont frôlé l'apoplexie, imaginant une attaque soudaine, à coup de pigments malveillants sur la capitale, du genre "Mars attacks, le palais présidentiel est pris et le drapeau kurde flotte sur la ville"... Il a fallu que les autorités municipales toussotent en leur tapotant le dos pour rétablir la vérité. En tout cas, la prochaine fois que des galopins kurdes dessinent un paysage tricolore, ils n'auront qu'à présenter ça comme un hommage au Sénégal...


  • Sinon, coup de théâtre, selon le Kurdistan Post, le propre fils de Massoud Barzanî, Masrour, qui dirige aussi les services de sécurité du GRK, a été arrêté en Autriche pour avoir tenté, avec 5 de ses gardes du corps, de dégommer l'éternel persécuté Kamal Sayid Qadir, qui avait été arrêté au Kurdistan et condamné à 30 ans, pour avoir abreuvé d'insultes (à caractère privé et sexuel) à peu près tout le gouvernement. La "victime", serait blessée et à l'hôpital, et a confirmé tout ça. Bon, le personnage étant un peu mythomane, il faut prendre tout ça avec prudence et attendre la confirmation ou non des autorités autrichiennes. Mais si c'est vrai, il faudrait quand même que les représentants de l'Etat kurde cessent de se comporter en "ciwanmerd" tribaux, ça va encore faire gloser Ali Babacan et Abdullah Gul.

OFFENSIVE TURQUE AU KURDISTAN D’IRAK


Au soir du 21 février, l’armée turque a lancé une opération contre les bases du PKK de Qandil, au Kurdistan d’Irak, en franchissant la frontière. L’opération a duré une semaine, avant le retrait des troupes turques. Mais le chef de l’état-major a déclaré qu’il se réservait le droit de reprendre ce type d’opération, si nécessaire, tandis que le PKK présentait ce retrait comme une lourde défaite de l’armée turque.

Les bombardements de l’armée turque sur la frontière irakienne, s’étaient poursuivis régulièrement, depuis décembre 2007. Le 4 février, des avions ont franchi la frontière pour bombarder 3 villages – vides - près de Qandil, sans faire de victimes, selon le PKK. De son côté l’armée turque a qualifié ce bombardement de « pilonnage massif » sur les bases des combattants kurdes.

Mais la plupart des observateurs ne s’attendaient pas à une offensive en février, en raison du climat encore hivernal, qui rend les opérations en montagne très difficiles. Le 18 février, dans le journal turc Zaman, proche de l’AKP, le journaliste Ercan Yavuz déclare que « l’armée turque est maintenant prête pour effectuer une opération terrestre en Irak ». La date la plus probable qui est donnée est la mi-mars.
Cependant, plusieurs responsables américains se sont rendus à Ankara avant la date de l’offensive. Le 13, c’est le général James Cartwright qui est arrivé à Ankara pour rencontrer le général turc Ergin Saygun et David Petraeus, le commandant des forces américaines en Irak. La rencontre devait porter sur la « lutte commune » des Etats-Unis et de la Turquie contre le PKK. Le 15 février, le ministre américain de la Justice, Michael Mukasey, s’est à son tour entretenu à Ankara avec des responsables turcs sur le même sujet. Le ministre américain a alors déclaré que cette coopération avait été « active et couronnée de succès » et qu’elle continuait.

Le même jour, dans toute la Turquie, la police était en état « d’alerte maximale » en raison des manifestations kurdes commémorant le 9ème anniversaire de la capture d’Abdullah Öcalan. Des heurts s’étaient produits entre la police et des manifestants kurdes, au cours desquels un garçon de 15 ans a été tué à Cizre. Lors de ses funérailles, la police anti-émeute est une fois de plus intervenue contre des jeunes manifestants qui ont détruits plusieurs boutiques, érigé des barricades dans les rues et lancé des pierres sur les forces de l’ordre turques. Des troubles agitaient aussi la ville kurde de Hakkari.

Le 21, des troupes turques, comprenant plusieurs milliers de soldats et 3000 commandos ont franchi pour la première fois la frontière, amorçant une opération terrestre contre le PKK. L’armée a pénétré de 20 km à l’intérieur du Kurdistan d’Irak, l’avancée de l’infanterie étant soutenue par les tirs d’artillerie, l’aviation et les « renseignements en temps réel » promis par les USA depuis le début de janvier sur les positions et mouvements du PKK.

L’armée turque affirme avoir détruit, totalement ou partiellement 312 positions. Quant aux pertes humaines, elles s’élèveraient au total à plus de 300 morts, dont 270 rebelles du PKK et 30 soldats selon le communiqué de l’état major turc alors que le site proche du Parti des travailleurs du Kurdistan a annoncé la mort de 130 soldats turcs et 5 PKK et annonce avoir abattu un hélicoptère, dont la perte a été confirmée par l’armée turque, qui évoque seulement un « incident technique ». Les sources kurdes indépendantes évaluent le bilan à une douzaine de morts, dont 5 civils côté kurde ; les pertes turques autour d’une trentaine de morts.

Le Gouvernement du Kurdistan d’Irak, qui a protesté contre cette violation de frontière, et accusé rapidement la Turquie de viser toute la Région kurde et non seulement le PKK, a mis ses Peshmergas en état d’alerte maximale, autour des grandes villes et sur les points stratégiques. Le 21 février, des blindés turcs basés à Bamarné, près d’Amadiyya, installés là depuis les accords de « cessez-le-feu » entre la Turquie, les Etats-Unis et le PDK en 1997, ont tenté de quitter leur caserne pour participer à une manoeuvre d’encerclement de la région frontalière de Hak. Ils ont été immédiatement encerclés par les peshmergas et violemment pris à partie par la population kurde, très hostile à l’opération turque et ils ont dû rebrousser chemin.

Le 24, de violents combats se déroulaient autour du camp de Zap, que les Turcs cherchaient à prendre d’assaut, couverts par l’artillerie et des frappes aériennes. Ce camp, à 6 km de la frontière turque et encastré dans une vallée profonde, est un des principaux points de passage pour les attaques du PKK en Turquie, ainsi que sur le camp de Harkuk, où des soldats étaient parachutés par hélicoptères. L’état-major parlait toujours de « lourdes pertes » dans le camp kurde, mais le mardi 25, de fortes chutes de neige ont contraint les troupes turques à stopper leur avancée. Le PKK a parlé alors de 200 soldats que leurs propres combattants auraient encerclé dans une des vallées montagneuses et a fait état aussi de « nombreux » soldats gelés sur place, les températures ayant chuté en dessous de – 15 degrés.

Le porte-parole du Gouvernement régional du Kurdistan a dénoncé la position américaine au sujet du raid turc sur les montagnes de Qandil : « Nous tenons pour responsable le gouvernement américain de ces opérations militaires, car sans son consentement la Turquie ne se serait jamais permis de violer la souveraineté territoriale et aérienne de l’Irak » a accusé Falah Mustafa, le ministre kurde des Relations extérieures. « Le Gouvernement régional condamne ces opérations militaires et le bombardement des infrastructures » et « demande à la Turquie de se retirer immédiatement de la Région kurde d’Irak. Le problème ne sera pas résolu militairement, mais par des moyens pacifiques. » Falah Mustafa a également insisté sur les mesures déjà prise par le gouvernement kurde pour stopper les activités du PKK dans la Région du Kurdistan, avant d’appeler à un dialogue direct entre Ankara, Washington et Erbil pour trouver une solution.

Le 25 février, le Premier ministre de la Région du Kurdistan, Nêçirvan Barzani, a tenu une conférence de presse, durant laquelle il s’est dit « très préoccupé » par l’opération turque et a appelé à la cessation immédiate de l’incursion. Le Premier ministre a insisté sur le fait que seule une solution politique pouvait résoudre la question : « Le Gouvernement régional du Kurdistan comprend que le PKK soit un problème pour la Turquie. Dans les années 1990, la Turquie, parfois avec notre aide, a essayé de résoudre militairement le problème avec le PKK et aujourd’hui, elle essaie à nouveau. Mais l’expérience nous a montré clairement que les méthodes militaires ne peuvent réussir. Je suis prêt à me rendre à Ankara. Une discussion quadripartite entre Washington, Istanbul, Baghdad, et Erbil aiderait à trouver une solution durable et pacifique à cette question. »

Le Premier ministre a également condamné la destruction d’infrastructures loin des zones frontalières par l’aviation turque, et sans rapport avec le PKK : «  Nous pensons que cela prouve qu’en dépit de leur but affiché, la Turquie vise la Région du Kurdistan. Je suis surpris par la faible réponse de Bagdad devant cette violation flagrante de la souveraineté irakienne. »

Le 26 février, le parlement kurde a d’ailleurs demandé la fermeture de ces bases turques et le départ de leurs 3200 soldats de la Région du Kurdistan. « Nous exigeons que le gouvernement turc quitte les bases qui avaient été établies dans la région du Kurdistan en raison des circonstances exceptionnelles que la région traversait avant la chute du régime de Saddam Hussein ».

La « faible réaction irakienne », dénoncée par Nêçirvan Barzani, a en fait beaucoup varié entre les premiers jours de l’offensive et le moment où les combats se sont intensifiés et enlisés. Le 23, le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki a appelé la Turquie à « respecter la souveraineté de l'Irak », tandis que le ministre des Affaires étrangères irakiens, le kurde Hoshyar Zebari, s’adressant à la BBC, qualifiait l’opération d’ « incursion militaire limitée dans une région lointaine, isolée et inhabitée » en ajoutant que « si elle continuait, ça pourrait déstabiliser la région, parce qu'une erreur pourrait déboucher sur une escalade ». M. Zebari a indiqué que le gouvernement irakien n'avait été informé des intentions turques qu'à « la dernière minute », qu’il n’avait pas donné son consentement à l’opération et que « malgré la promesse d'Ankara d'"éviter de cibler les infrastructures, plusieurs ponts ont déjà été détruits ».

Cependant, le 24, le porte-parole du gouvernement irakien, M. Ali Dabbagh, déclarait : « Nous ne pensons pas que ces opérations représentent une atteinte la souveraineté de l'Irak. Nous savons qu'il existe une menace contre la Turquie de la part des terroristes du PKK, mais nous avons fait savoir à la Turquie que cette opération ne devait pas déstabiliser l'Irak et la région ».

Mais l’impopularité de l’incursion turque et le scepticisme grandissant concernant son efficacité a peut-être amené Bagdad à durcir son propos car le même jour un nouveau communiqué appelait la Turquie « à retirer au plus vite ses troupes du nord de l'Irak » en affirmant, cette fois-ci, qu’il s’agissait d’une « menace pour sa souveraineté ». Le cabinet du Premier ministre invitait aussi Ankara à « ouvrir un dialogue bilatéral avec le gouvernement irakien » et que le conflit avec le PKK ne devait pas être traité par des voies militaires », tout en assurant « comprendre les préoccupations légitimes de la Turquie en matière de sécurité ».

Les dignitaires chiites ont désapprouvé, pour leur part, l’opération turque. Un religieux chiite, Qasim al-Tayi, a ainsi déclaré le 24 février : « Nous rejetons catégoriquement l’incursion turque dans le nord de l’Irak et nous la considérons comme une agression et une violation de la souveraineté de l’Irak ; nous appelons toutes les forces politiques, les décisionnaires et l’opinion publique à s’opposer fermement à cette invasion. L’avancée des troupes turques à l’intérieur du territoire irakien sous prétexte de pourchasser le Parti des travailleurs du Kurdistan peut amener la destruction de la plupart des infrastructures du pays et la mort d’Irakiens innocents. » Qasim al-tayi a ajouté que cette incursion était un acte illégitime, « qui ne peut avoir d’explication rationnelle ».

Du côté américain, dès le 22 février, le président George Bush avait approuvé l’offensive, mais devant les difficultés rencontrées par les troupes turques, la dureté inattendue des combats, aggravée par de lourdes chutes de neige, et le danger d’affrontements directs entre les Turcs et les Peshmergas, Washington a très vite craint une contagion du conflit au Kurdistan d’Irak et appelé la Turquie à se retirer « le plus vite possible ».

Mais le ministre de la Défense turc, Vecdi Gönül, a semblé sourd aux demandes rapides de retrait, qu’elles émanent des Etats-Unis, de l’Irak ou de l’Union européenne et a déclaré : « la Turquie restera dans le nord de l’Irak le temps qu’il faut », tout en assurant les Américains que son pays n’avait pas l’intention d’occuper le « nord de l’Irak ».

Le 27 février, une délégation turque est partie à Bagdad pour s’entretenir de l’opération dans le nord du pays. A l’issue de cette rencontre, Ahmet Davutoglu, le conseiller pour la politique étrangère du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, a déclaré dans une conférence de presse donnée avec le ministre des Affaires étrangères irakien, le Kurde Hoshyar Zebari : « Il n'y aura pas de calendrier de retrait des troupes turques du nord de l'Irak tant que la présence de l'organisation n'est pas éliminée ».
Mais dans la nuit du 27, de façon inattendue, l’armée turque a commencé de se retirer du Kurdistan d’Irak, alors qu’une heure auparavant le chef de l’armée turque, le général Yasar Büyükanit, refusait également de donner une date de retrait : « Un délai rapide est une notion relative, il peut s’agir parfois d’un jour et parfois d’un an ».

La plupart des médias turcs, ainsi que la classe politique et même l’homme de la rue sont persuadés que cette volte-face a pour cause les pressions américaines, et la menace de fermer l’espace aérien à l’aviation turque, en plus de suspendre les informations en temps réel sur les mouvements des Kurdes, malgré les démentis de l’armée. La presse turque a même parlé de « bombe » pour qualifier l’annonce officielle de la fin des opérations. Face à ces affirmations, Yasar Büyükanit, interrogé par le journal Milliyet, a réitéré que « la décision du retrait comme l’ordre du départ des opérations militaires, ne dépend que de lui, et ni l’administration politique ou un pays allié (US), ne peuvent prendre une telle décision », laissant donc entendre que ce retrait a surpris même le Premier ministre turc. : « Monsieur Erdogan était au courant de l’ensemble de l’opération y compris la décision du retrait, par contre, il ne savait pas, quand et où exactement se déroulerait le retrait ». Le général insiste sur le fait que ce n’est pas l’ultime visite du Secrétaire d’Etat Robert Gates qui est à l’origine de sa décision. Il explique ainsi que les troupes avaient commencé à se retirer deux jours avant l’annonce officielle, survenue le 29, pour  « éviter que les Kurdes n’attaquent nos soldats lors de leur retrait ». Mais cette explication ne semble guère convaincante, car ce sont précisément les Kurdes, les Peshmergas d’abord et puis les combattants du PKK qui, dès le 27, ont donné l’alerte aux médias.

Dans la classe politique turque, le retrait a causé quelques remous, notamment au Parlement. Les deux partis de l’opposition, le Parti du mouvement nationaliste (MHP) et le Parti républicain du peuple (CHP) ont vivement critiqué le chef de l’état-major et Robert Gates. Le président de l’assemblée turque, Köksal Toptan, a condamné également sur la chaîne turque TRT les pressions américaines, y voyant une manoeuvre régionale : « J’imagine qu’ils voulaient envoyer un message au gouvernement irakien central d’une part, et à l’administration régionale du Kurdistan du nord de l’Irak d’autre part, en disant que, si vous êtes en colère contre nous car nous aidons les Turcs, ces derniers se retireront dès que nous le leur demanderons. »

Sitôt après l’annonce officielle du retrait Recep Tayyip Erdogan a fait deux déclarations contradictoires. D’une part, en s’adresant au gouvernement de Bagdad, il a déclaré que « la Turquie et l'Irak ne devraient pas permettre aux rebelles kurdes du PKK d’empoisonner leurs relations bilatérales » et il a appelé à nouveau une coopération entre les deux pays pour chasser le PKK du nord de l’Irak. Mais d’un autre côté, il a également invité le PKK à déposer les armes, en déclarant que la démocratie turque était « assez mûre » pour résoudre politiquement la question kurde : « Notre démocratie est assez mûre pour prendre en compte toutes les sortes de divergences, toutes les sortes d'opinions politiques tant qu'elles restent sur le terrain de la loi ».

Le PKK a, en réponse à l’attaque turque, appelé les Kurdes de Turquie à des mouvements d’émeutes urbaines. Bahoz Erdal, un des leaders de ce parti, a ainsi déclaré : « La jeunesse kurde doit répliquer à cette opération » et « la réponse doit être forte. S’ils veulent nous balayer, notre jeunesse doit rendre la vie dans les villes insupportables et brûler des centaines de voitures chaque nuit. » Le PKK accuse également les USA d’avoir participé activement à l’opération. « Des avions de reconnaissance américains ont survolé la région. Ils donnaient des informations à la Turquie sur nos positions en temps réel et les avions turcs venaient ensuite nous bombarder. » Bahoz Erdal a également accusé des groupes de Kurdes irakiens d’avoir pris part au combat, en dénonçant ouvertement le président irakien, Jalal Talabani : « Selon nous, l’attitude de Jalal Talabani est très dangereuse. Nous avons des informations selon lesquelles il aurait même invité l’armée turque à Qandil. » Le Porte-Parole du PKK a invité également les Kurdes d’Irak à s’opposer à l’invasion.

En fait, dès le 23 février, des manifestations contre l’opération militaire avaient été organisées par le DTP, d’abord à Istanbul, puis dans quelques villes kurdes. A Diyarbakir, ce sont quelques milliers de personnes qui ont défilé le 25 pour réclamer la fin de l’incursion, avec des slogans très hostiles au Premier ministre turc et au président d’Irak, Jalal Talabani, alors en visite en Turquie. Les manifestations n’ont pas cependant dégénéré en violences, la police ayant visiblement reçu des instructions pour éviter tout embrasement.

De son côté, le gouvernement iranien, par la voix de son porte-parole Mohmmad Ali Hosseini, a annoncé avoir « renforcé » sa frontière avec le Kurdistan d’Irak après l‘offensive turque, afin d’empêcher les combattants du PKK de se réfugier en Iran.

mercredi, février 20, 2008

Radio

Dimanche 24 février à 8h00 sur France Culture : Histoire du peuple arménien, avec Gérard Dédéyan (Histoire du peuple arménien, Privat). Foi et tradition, J.P. Enkiri.
A 18h10 : Stéréotypes sur le Coran, avec Michel Cuypers (Institut dominicain d'études orientales au Caire), qui a participé au Dictionnaire du Coran (Bouquins Laffont). Cultures d'islam, A. Meddeb.
Vendredi 29 février à 6h00 sur France Culture : Islams d'aujourd'hui. Le Jihâd. Cours de Makram Abbès. L'Eloge du savoir.

"Les deux oiseaux"


La Saint-Valentin kurdo-turque, c'est aussi ça... Ou l'histoire de Nuray et d'Abdulla, mariés "jusqu'à ce que la loi les sépare." Pas la loi turque, hein, juste la loi de France, terre d'humanisme.

mardi, février 19, 2008

Droits de l'Homme au Kurdistan d'Irak : fermeture de la prison d'Akre

Après s'être fait aligner en juillet 2007 par Human Rights Watch, le Gouvernement kurde d'Erbil avait promis de faire en sorte que ses prisons et la façon dont les détenus y étaient expédiés, jugés, traités, soient un peu plus conforme aux critères réclamés par l'Observatoire international des prisons et toute autre organisation de défense des Droits de l'Homme. Nêçirvan Barzanî avait même fait une conférence de presse pour soutenir "énergiquement" l'engueulade de HRW contre son propre gouvernement (une attitude que les Turcs ne pourront JAMAIS comprendre, mais bon...).

Environ sept mois après le rapport, où en est-on dans les faits ? Le Gouvernement vient juste de décider la fermeture de la prison d'Akre, comme l'a annoncé le ministre des Droits de l'Homme, Shwan Muhammad Aziz. Il est prévu de construire deux prisons toutes neuves et plus reluisantes devant les organisations internationales. Dans la foulée, le même ministre annonce que "toutes les prisons de la Région kurde" dépendront désormais du ministère du Travail et des Affaires sociales". Explication ? Ce transfert de compétence est présenté comme "une avancée vitale pour comprendre et identifier les tâches à entreprendre pour cette réforme." Traduire : le Conseil des ministres ou son Premier Ministre a dû juger que ni le ministère de l'Intérieur ni celui de la Justice n'étaient fiables pour améliorer la condition de vie des détenus, ce qui, à bien y réfléchir, n'est pas idiot du tout, d'autant que ça dégage le personnel des prisons de l'emprise des Asayish (services de sécurité).

Torture en Syrie : mort d'un député kurde

L'ancien député syrien, le Kurde Osoyê Dadalî ('Uthman Muhammad Dadalî en arabe) est mort à l'hôpital al-Kanadî d'Alep, où il était hospitalisé. Quelques mois auparavant il avait été arrêté et torturé par les services syriens. Relâché, sa santé était restée gravement compromise. Son état s'était aggravé au début du mois et il a fini par mourir des suites de ces sévices.

Osoyê Dadalî avait été député dans les années 90 au Parlement syrien, pour représenter Koban, sa ville natale. (source Avesta.net)

Dans le même temps, les voix des Kurdes de Syrie s'élèvent pour réclamer des nouvelles et la libération du chanteur kurde Alî Tico, enlevé par l'Etat syrien depuis la fin de janvier pour des raisons que Damas n'a pas jugé bon de préciser. Le dengbêj est âgé de 80 ans et souffre du coeur. Jusque là, on ne sait dans quelles conditions il est détenu ni quel est le traitement qui lui est réservé. (source Efrin.net).

Dans le même temps, le Haut-Commissariat pour les réfugiés aux Nations Unies, après une visite d'António Guterres au Kurdistan irakien, a donné sona ccord pour que les Kurdes de Syrie qui ont fui leur pays pour la Région du Kurdistan, reçoivent officiellement le statut de réfugiés, comme l'a annoncé Dindar Zebarî, le coordinateur du GRK pour l'ONU.

Le Gouvernement kurde estime à 3.500 réfugiés kurdes iraniens, 500 Kurdes venus de Syrie, et 6000 Kurdes de Turquie, en plus des quelques 160.000 réfugiés non Kurdes venus d'Irak.

Les Kurdes de Syrie sont venus principalement après les émeutes et les représailles du Newroz 2004 à Qamishlo et sont installés dans un camp de la région de Duhok. (VOI)

lundi, février 18, 2008

La Question kurde au XXI° siècle

Lundi 25 février 2008, de 9h30 à18 h30

La question kurde au XXIème siècle
organisée à l’occasion du 25ème anniversaire de l’Institut kurde de Paris

aura lieu au PALAIS BOURBON-Salle 62-17-126, rue de l’Université, 75007 Paris.


Présentation

"L’Institut kurde a été fondé dans une période particulièrement sombre de l’histoire kurde. Contentons-nous de quelques faits : après avoir lancé une guerre destructrice contre son voisin l’Iran, Saddam Hussein inaugure une politique exterminatrice à l’encontre des Kurdes ; le meurtre, en 1983, de 8.000 Barzani constitue un signe avant-coureur des répressions à venir. En Iran, où la révolution de 1978-1979 se solde par la victoire du clergé, les villes kurdes deviennent le théâtre d’une répression massive, incluant l’usage de l’aviation militaire contre les civils. En Turquie, le régime militaire instauré en septembre 1980 considère la kurdicité comme une pathologie à soigner par le nationalisme turc et transforme les provinces kurdes en prisons à ciel ouvert. Bien que convoités par le pouvoir d’al-Assad, les Kurdes syriens sont réduits au silence, nombre d’entre eux, dépossédés de leur nationalité, ne jouissent pas d’une existence légale.

Dans ces circonstances, la diaspora kurde en Europe prend la relève pour devenir le centre névralgique, non tant des luttes politiques, mais d’une résistance pour la sauvegarde d’une culture effectivement en péril. La fondation de l’Institut kurde constitue le premier signe majeur d’un renouveau depuis un espace éloigné.

Le quart du siècle écoulé depuis fut riche aussi bien en tragédies qu’en espoirs : les Kurdes irakiens menacés d’une disparition paraissant inéluctable au lendemain des opérations Anfal en 1988-1989, purent, à la faveur de la Deuxième Guerre du Golfe (1991) s’engager dans une expérience d’autonomie politique ; la décapitation du leadership kurde iranien (1989-1992) n’entrava guère le renouveau culturel kurde dans ce pays ; malgré sa politique de terre brûlée, mise en place en réponse à la guérilla du PKK, la Turquie ne parvint guère à «éradiquer» la Kurdicité.

Depuis une décennie, les Kurdes syriens connaissent un renouveau qui passe par l’engagement pacifique dans la lutte aussi bien pour la démocratie que par les droits culturels. Enfin, alors que disparaissent les anciennes figures intellectuelles, souvent collaborateurs actifs de l’Institut (Zaza, Cegerwxin, Güney, Uzun...) sans voir réaliser leurs rêves d’un Moyen-Orient démocratisé où les Kurdes auraient toute place ensemble avec les autres peuples, de nouvelles figures investissent les champs littéraires et artistiques.

Au-delà d’un moment de réflexion sur son propre passé, l’Institut kurde souhaite, à travers ce colloque, faire le bilan de ces 25 dernières années de l’histoire kurde."


Programme

9h30 : Accueil des participants

10h00- 10 h 30 : Mots de bienvenue et introduction aux débats

* ∗ François Loncle , député de l’Eure
* ∗ Danielle Mitterrand , présidente de la Fondation France-Libertés
* ∗ Kendal Nezan : 1983-2008 : l’Institut kurde, un regard rétrospectif


10h00 -13h00 : Etudes de cas

Modérateur : ∗ Abbas Vali , président de l’Université du Kurdistan, Erbil

* ∗ Gilles Dorronsoro , professeur de sciences politiques à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne
* ∗ Hashem Ahmadzade , maître de conférence à l’Université d’Exeter
* ∗ Gareth Stansfield , co-directeur, Centre des Etudes kurdes, Université d'Exeter
* ∗ Jordi Tejel , chercheur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) : Les Kurdes en Syrie


12h30 – 14h15 : déjeuner

14h30-16h30 : Regards transversaux

Modérateur : ∗ Jonathan Randal , journaliste et écrivain

* ∗ Hamit Bozarslan , professeur de sciences politiques à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) : La question kurde de 1983 à 2008
* ∗ Ann-Catrin Emanuelsson : La Diaspora comme espace culturel et politique
* ∗ Clémence Scalbert , docteur en géographie : Le champ culturel kurde aujourd’hui


16h30-18h30 : Les perspectives de la question kurde au XXIème siècle

Modérateur, ∗ Bernard Dorin , ambassadeur de France

* ∗ Gérard Chaliand , spécialiste de géopolitique
* ∗ Peter Galbraith : ancien ambassadeur des Etats-Unis en Croatie
* ∗ Fuad Hussein , directeur de cabinet du président du Kurdistan
* ∗ Najmaldin O. Karim , président de l’Institut kurde de Washington
* ∗ Kendal Nezan , président de l’Institut kurde de Paris

samedi, février 16, 2008

Coup de projo sur : Sima Bina





Sima Bina est né au sud du Khorasan . A neuf ans, elle entame déjà sa carrière de chanteuse à la radio iranienne, sous la direction de son père, Ahmad Bina à la fois musicien et poète, qui écrivit ses premières chansons. Elle étudie le radif et le chant avec de grands maîtres comme Maroufî et Zarrin Panjeh. En 1969, elle achève ses études à l'université de Téhéran (Beaux Arts) et poursuit son étude du raf avec le maître Davami.

A partir de 1979, tout en enseignant la musique classique, elle se consacre à la collecte et à la redécouverte de chants folkloriques persans, kurdes, lor, bakhtyar, turkmènes, enfin de toutes les régions d'Iran, avec une prédilection pour le Khorasan, sa région natale, qu'elle parcourt en tous sens.
Les chanteuses ne pouvant de produire en public en Iran, sinon devant une assemblée strictement féminine, ce qu'apparemment elle refuse, Sima Bina a pu heureusement chanter à l'étranger et acquérir une renommée internationale, avec sa voix magnifique et très expressive.

vendredi, février 15, 2008

Le Contre-Guide des Egarés

A Erzurum, un enfant de huit ans est poursuivi en justice pour avoir parlé en kurde lors d'un meeting électoral du DTP.

L'avocat dudit criminel fait tout de même observer que, selon le code pénal turc, on est susceptible d'être poursuivi pénalement en tant que mineur uniquement à partir de 12 ans. Mais bon, il s'agit ici d'une graine de terroriste, puisque le père du délinquant a été président du DEHAP et a fui la Turquie pour des raisons politiques. Ils ont donc raison de mettre la main sur le fiston avant qu'il ne prenne les mauvaises manières de son père. Lors du meeting, le gamin avait donc pris la parole en demandant en kurde, pourquoi son père n'était pas avec lui. Au moins la réponse de l'Etat ne s'est pas fait attendre : PARCE QUE ! T'as compris, maintenant ?

Dans le même temps on apprend que le maire de Batman a été condamné à 10 mois de prison pour avoir déclaré au Los Angeles Times qu'Öcalan était le leader des Kurdes, que le PKK n'était pas un groupe terroriste et qu'il fallait les autoriser à avoir une activité politique. Mis à part que le maire de Batman est un crétin, est-ce que cela méritait 10 mois de prison ? Bah quand on se reporte au cas précédent, oui, bien sûr.

De fait, au rebours de Maïmonide qui, dans son Guide des égarés, écartait trois sortes d'irresponsables, les imbéciles, les femmes et les enfants à qui il fallait interdire l'étude de la métaphysique, de peur que cela ne leur embrouille la cervelle, la justice turque, elle, ne fait pas dans la discrimination. Le Rabbi Moshe peut en prendre de la graine.

(source NetKurd).

jeudi, février 14, 2008

Melayê Cizirî : Yekbûn

"La Passion fait que deux âmes n’en sont plus qu’une
Aussi est-il besoin de les assembler dans un seul corps

L’âme et le corps ont fait union
Comme l’eau est mêlée au vin

Ta compagnie est la vie du coeur et de l’âme
Qui goûte l’amertume de l’éloignement en est dévasté*

Ma poitrine n’est pas seulement la cible de Tes flèches
Ton apparition fait aussi jaillir les lances sur les coeurs

Les Pléiades s’illuminent à la lumière de l’aube
Et assurément la lumière de la Lampe me pénètre aussi

Si l’ivresse de l’amour est comme le styrax
Assurément, véritablement, elle ne fait que croître

Chaque soir et chaque matin, par la main de la Beauté,
A notre vin sont puisées les coupes

Le voyage nous mène à la cellule de la retraite
Allah, quelle retraite et quel voyage ?

Ouvre par ta venue le cadenas de mon coeur
Car de mon coeur ta venue est la clef

Quand l’éclair jaillit devant le rideau
Alors oui de sa lumière jaillissent les flèches

L’arc-en-ciel resplendit de son corps
Dont les senteurs d’ambre et de musc se répandent

Le miroir de ton coeur, Mollah, a été bien poli :
Maintenant le vin pur s’y laisse voir."

* les vers en italique sont écrits en arabe.

Sheikh Ehmed Nishanî, le "Mollah de Djézîr", (1570?-1640?) Dîwan, beyt 29, trad. Sandrine Alexie.

***

'Ishqê ku bidin bi yek dû erwah
Peyweste divê bi hev bin eshbah

Can û cesedan ku ittihad in
Wel maû leh-ûl mizacu bir-rah

Wesla te li can û dil heyat e
Men zaqe meraret-el newa tah

Tenha ne di sîne min xedeng in
Min lehzi ke filqulubî ermah

Perwîn ji shefeq xuya bûn
La bid'e we fihi min ke mishbah

Lew mistû min-el hewa ke ban in
La bid'e we qed temidî erwah

Her sham û seher bi destê xûban
Min xemretina tedûrû eqdah

Seyyahi me dîn di xelwe îro
Ellah ku çi xelwe û çi seyyah

Ifteh bi lîqa ke qufle qelbî
Fel-qelbû lehû lîqa ke miftah

Berqê ku veda ji ber nîqabê
Fel-lamîû mîn sena hû qed lah

Qews û qezehan numan ji bala
Wel-'enberû mîn sheza hû qed fah

Ayîne dilê Mela cela da
Mîn tel'etî fe qed sefer-rah".


La Saint-Valentin au Kurdistan

Tout au long du Moyen-Âge, en Syrie, en Egypte, dans les deux Irak et la Djézireh, on a mêlé allègrement les fêtes entre communautés. Déjà le Newroz des Kurdes et des Persans était célébré en Egypte comme en Mésopotamie, car il coïncidait avec d'autres fêtes du Nouveau Printemps, que les paysans du Proche et du Moyen-Orient consacrent depuis des millénaires (hé oui, on ne refait pas un paysan, même converti à l'islam : le calendrier lunaire c'est bien, mais c'est quand même le soleil qui fait pousser le blé !).

Les musulmans du Caire, d'Alep, de Damas, de Mossoul, d'Amide, se pressaient volontiers aux fêtes chrétiennes, comme l'Epiphanie qui avait un grand succès en Egypte, ou les célébrations de la Nativité (qui peut-être donna l'idée à Gökburî, prince d'Erbil, de lancer le Mawlud) ou bien la saint Elias ou Saint Georges/Khidr les Arméniens et les Alévis de Khartpert, Pertek et du Dersim fêtaient conjointement car les deux prophètes et le saint fusionnaient souvent dans les croyance.

Mais au delà des syncrétismes occasionnels, la raison du succès des fêtes chrétiennes auprès des musulmans, c'est que 1/ils les trouvaient très jolies ; 2/ elles étaient plus nombreuses (surtout avec la multiplication des églises en Orient et donc des saints). On lira utilement à ce sujet L'Orient des Croisades, d'A.M. Eddé.

Aujourd'hui, on peut voir un beau Père Noël au Parc des Martyrs d'Erbil (bon d'accord ils le laissent là toute l'année, n'ayant sans doute pas le coeur de le retirer tellement il est beau). On fête aussi la Saint Valentin avec enthousiasme et les boutiques d'Erbil/Hewlêr proposent actuellement fleurs, cartes musicales, plus tous les cadeaux possibles, destinés non pas seulement aux amoureux mais à tous la famille, les amis, etc (les Kurdes ont le coeur large), comme nous l'apprend un micro-trottoir de VOI :

"Propriétaire d'une petite boutique de mode pour femme à Erbil, Haiman (26 ans), est très pris par ses clientes : "Beaucoup de femmes viennent pour acheter des vêtements rouges" (le rouge est la couleur du mariage et de l'amour), les hommes achètent aussi des vêtements à offrir à leur femme ou leur petite amie."

Une enseignante célibataire de 33 ans, Aven, confirme qu'aujourd'hui elle s'habillera en rouge, mais n'achètera des cadeaux que pour ses parents." Une autre enseignante, Tara, mariée et mère de 4 enfants, fait carrément une liste : "J'offrirais des cadeaux à mon mari, mes deux fils, mes deux filles, et des amies. La Saint Valentin est l'occasion pour moi s'envoyer un message à tous ceux que j'aime."

Tenog, 11 ans, va faire une fête avec ses camarades de classe : "Nous avons décidé de fêter la Saint Valentin à l'école, et j'offrirai des fleurs à mes professeurs."

Jusqu'aux poètes qui s'y mettent : le turbulent et flamboyant Ferhad Pîrbal, qui récemment, lors des menaces turques est parti avec ses élèves en excursion le long de la frontière pour se déculotter et montrer son cul aux soldats turcs, a visiblement l'humour adoucie par la fête : "Je vais faire une lecture de poésie amoureuse à un groupe de jeunes gens".

Même ceux qui n'ont rien de prévu attendent l'amour, des roses ou des cadeaux comme les gosses la venue du Père Noël. Sazan, 22 ans, déclare n'avoir rien de prévu pour c ejour, mais s'habillera tout de même en rouge, en ajoutant : "Je sens que je vais recevoir une rose rouge cette nuit."

Et comme il n'y a pas d'amour kurde sans coeur brisé (c'est comme ça qu'on fait les immenses déplorations versifiées des poésies amoureuses kurdes), pour Dalia, 18 ans, élève ingénieur, la Saint Valentin est l'occasion de se rappeler "son amour perdu".

En conclusion :

Roja Valentîn a we pîroz be !

Radio

  • Dimanche 17 février à 18h10 sur France Culture : Dictionnaire du Coran (Bouquins-Laffont), avec Mohammad Ali Amir-Moezzi, directeur de l'ouvrage et François Déroche, pour Le Coran, PUF. Cultures d'islam, A. Meddeb.

  • Lundi 18 février à 20h00 sur France Musique : 38° Rugissants. Oeuvres de compositeurs orientaux. Concert du 20-11-07, La Rampe à Echirolles. Avec le Kronos Quartet : David Harrington et John Sherba, violons ; Hank Dutt, alto ; Jeffrey Zeigler, viloncelle.

- Franghiz Ali-Zadeh : Mugam Sayagi, Lullaby (arrgt Jacob Garchik) ;
- Aleksandra Vrebalov : Sketch from a Balkan Notebook ;
- Tanburi Cemil : Evic Taksim (arrgt Stephen Prustman) ;
- Gétatchèw Mekurya : Aha gèdawo (arrgt Stephen Prustman) ;
- Hamza El Din : Escalay (Water Wheel) ;
- Anonyme : Oh Mother, the handsome man tortures me (arrgt Kronos Quartet, transc. Ljova) ;
- Ram Narayan : Alap from Raga Mishra Bhairavi (arrgt Kronos Quartet, transc. Ljova) ;
- Dmitri Yanov-Yanovski : Second Mouvement de Chang Music IV ;
- Rahman Asadollahi : Mugam Beyati Shiraz ;
- Reich : Triple Quartet en Trois Mouvements.

  • Mardi 19 février à 22h00 sur France Culture : Musique traditionnelle d'Azerbaïdjan. 09-02-08, Théâtre des Abbesses. Elshan Mansurov, kementché ; Malik Manzurov, târ ; Kamran Karimov, nagara. Couleurs du monde, F. Degeorges.

  • Jeudi 20 et et vendredi 21 février à 06h00 sur France Culture : Islams d'aujourd'hui ; l'Eloge du savoir :

- L'islamisme aujourd'hui, par Hamit Bozarslan (20/02) ;
- Salafismes au XX° siècle, cours de dominiques Thomas (21/2)

mercredi, février 13, 2008

"Le bonheur dans le crime"

La Loi du Chapeau a encore frappé... Si ça continue, je vais devoir faire un libellé rien que pour elle. Cette fois-ci, ça ne tombe pas sur la tête d'Osman Baydemir ou d'un autre maire : l'éditeur Mehdi Tanrikulu, a été condamné à 5 mois de prison pour s'être plaint d'un procureur en kurde et d'avoir persévéré en s'exprimant en kurde au tribunal.

La 1ère Chambre criminelle de la Paix (sic) d'Istanbul) a donc jugé que Mehdi Tanrikulu, qui dirige la maison d'édition Tevn, méritait 5 mois de prison pour avoir enfreint la sublimissime "Loi du Chapeau", à l'oral comme à l'écrit.

Mehdi Tanrikulu avait été auparavant condamné à douze ans et demi de prison pour appartenance au PKK par la Haute de Sûreté de Diyarbakir. Il a été aussi accusé (mais acquitté) de "propagande pour une organisation illégale", après avoir publié un livre de Zülfikar Tak racontant les pratiques de torture dans la prison de Diyarbakir, pratiques qui ne sont pas du tout de notoriété publique, comme chacun s'en doute. De plus, un procès est toujours en cours contre lui à Istanbul, par la 14ème chambre pénale, pour la publication d'un livre dont le titre a l'air si alléchant qu'à mon avis, c'est surtout une arme de contre-propagande visant les lumières de la pensée apoïste : Le Mouvement kurde pour la liberté et le rôle du PKK dans le processus impérialiste du capitalisme. Au moins l'éditeur ne craint pas d'assommer ses lecteurs dès la page de couv', ils sont prévenus...

Je suppose que c'est au cours d'un de ces procès que le procureur incriminé, Muammer Özcan, a, dans son acte d'accusation, parlé du "soi-disant peuple kurde". Louons la prudence scientifique de cet homme, qui ne s'aventure pas à relayer la fable de l'existence d'un peuple mythique s'il n'a pas eu l'occasion d'en voir de visu. Après tout, s'il exerce à Diyarbakir, on se demande où il aurait pu rencontrer des Kurdes. Je l'imagine très bien sur la place Salahaddin ou devant la grande Mosquée, déclarer, après avoir bien regardé alentour : "Vous voyez des Kurdes, vous ? Vous croyez que ça existe ? Vous pouvez me le prouver ?"

Donc, Mehdi Tanrikulu, histoire de lui prouver que les Kurdes existent, écrit une plainte contre lui, en kurde, pour "injure" à son identité. Mauvaise idée. Le procureur ne fait l'objet d'aucune enquête mais, par contre, l'accusateur se fait aligner pour violation de la Loi du Chapeau (article 222). Il persiste, se fait accompagner d'un interprète au tribunal, et déclare, en kurde : "J'ai le droit de m'exprimer dans ma langue maternelle et son alphabet doit être accepté par les institutions." Il a même le mauvais goût (ou le mauvais esprit) de rappeler l'article 39/5 du Traité de Lausanne qui "garantit à tous les citoyens turcs le droit d'utiliser leur langue maternelle dans les tribunaux." Offusquée par cette "insistance à commettre un crime" (c'est presque un titre de Barbey d'Aurevilly), la cour a tranché et Mehdi Tanrikulu en a pris pour 5 mois. Comme il a l'intention de faire appel, on imagine que les oreilles des juges turcs n'ont pas fini d'être écorchées par ce terrible idiome qui menace la cohésion de la République.
(source bianet.org).

Par ailleurs, Recep Tayip Erdogan, s'exprimant sur l'incendie de Ludwigshafen a déclaré, sans qu'on voit trop le rapport, que "l'assimilation" était un crime. Il a même dit "contre l'humanité", pour faire bonne mesure, tant qu'à faire il aurait pu dire "génocide". En tout cas, les Kurdes ont été ravis de l'apprendre. Mehdi Tanrikulu ferait mieux de le citer la prochaine fois au lieu de se fier à un traité poussiéreux signé par un obscure quidam nommé Ismet Inönü...

lundi, février 11, 2008

Das Andere Istanbul

Actuellement présenté à la 58° Berlinale, Das Andere Istanbul (L'Autre Côté d'Istanbul), de Döndü Kiliç, est un documentaire de 82 mn sur les homosexuels de la capitale, dont Mehmet Tarhan, un Kurde de 28 ans.

Présentation de la production :

"Pour ceux qui sont au fait, Istanbul est quelque chose comme La Mecque gay des Européens. Comment une telle chose est possible aujourd'hui en Turquie ? Durant le tournage nous avons pu observer qu'au-delà des médias, qu'avec le débat sur l'entrée de la Turquie en Europe et l'adoption croissante d'un mode de vie occidentale, une communauté turque gay a émergé et commence à avoir assez de confiance en elle-même pour réclamer ses droits. Un des membres de cette communauté est un Kurde de 28 ans, Mehmet Tarhan. Deux ans auparavant il a été arrêté et emprisonné. En tant que gay, il aurait pu être déclaré inapte au service militaire, mais aurait dû pour cela faire face à une série de démarches humiliantes. Un "rapport de contamination" aurait été délivré, un certificat d'anormalité psychosexuelle. Le mandat d'arrêt de Mehmet Tarhan n'a jamais été levé et sa liberté est constamment menacée. Güney, 28 ans, rêve de devenir un jour un "vrai danseur de danse orientale" mais actuellement joint les deux bouts en travesti clandestin dans un cinéma porno. Mert, 40 ans, va quitter Istanbul. Il était venu dans cette grande ville jeune homme, quand sa famille avait découvert qu'il était gay. Bawer, 25 ans, veut aussi entamer un nouveau départ. Ce menteur charmant et éloquent avait fait croire à ses parents qu'il avait une relation avec une amie proche, Leyla. Dans plusieurs séquences le film montre comment les protagonistes, chacun à leur façon, essaient de vivre et de s'adapter à un environnement à dominante homophobe, en essayant de se battrepour leurs droits et la liberté de vivre leur vie telle qu'ils l'ont choisie."

Site de la 580 Berlinale.

Concert de soutien à l'Institut kurde